Dupond-Moretti : un ministre en question
Le garde des Sceaux s’est-il servi de ses fonctions de ministre pour régler ses comptes avec des magistrats avec qui il était en conflit comme avocat?
« Pour moi et pour mes proches, ce procès est une infamie. Bien sûr, c’est une épreuve. Mais c’est aussi un grand soulagement parce que je suis venu me défendre ». Lundi 6 novembre à 14 heures, Éric Dupond-Moretti est entré dans la première chambre de la cour d’appel de la Cour de Justice de la République (CJR), juridiction d’exception qui a jugé le Maréchal Pétain en 1945, tel le taureau dans l’arène, prêt au combat.
« J’entends me défendre dignement. J’entends me défendre complètement, mais j’entends me défendre fermement, a rétorqué à la barre le Garde des Sceaux après la lecture des faits de “prises illégales d’intérêts” qui lui sont reprochés. “Durant trois ans et demi et jusqu’à ces dernières heures, on a piétiné ma présomption d’innocence” s’est-il exclamé dénonçant “des caricatures, des approximations, des mensonges parfois et aussi des injures”.
Étrange procès décidément, qui voit pour la première fois un ministre de la Justice, lui-même jugé pour des délits commis dans l’exercice de ses fonctions. Tout en continuant à les exercer, car il conserve la “confiance” de la Première ministre et le soutien ostensible du Président de la République. Un ministre, grand avocat de carrière, prêt à attaquer pour mieux se défendre.
Éric Dupond-Moretti nommé ministre de la Justice le 6 juillet 2020 est soupçonné d’avoir usé de son autorité pour chercher à se venger de quatre magistrats avec lesquels il s’était embrouillé lorsqu’il était encore avocat. Vaste conflit d’intérêts ou bien simple règlement de comptes entre magistrats et avocats qui se jalousent ?
C’est tout l’enjeu de ce procès dont le verdict est attendu dans dix jours.