Échec à Bolloré
Le groupe du milliardaire réactionnaire a eu beau faire feu de tout bois, les Français ont choisi librement de refuser le pouvoir au Rassemblement national.
Tout était pourtant bien huilé, bien monté, bien organisé : un groupe de médias réactionnaires à la Fox News, constitué à la hussarde en prenant d’assaut deux chaînes de télévisions, une radio, un journal, tous arraisonnés à coups de millions, peuplé des journalistes militants et d’intellectuels d’extrême-droite alignés au cordeau ; des programmes tissés de faits divers horrifiques, de quolibets anti-gauche, de prêches intégristes, de campagnes « anti-wokes », de dénonciation obsessionnelle de la « bien-pensance » et de philippiques déclinistes, sur le double thème du « c’était mieux avant » et du « on est chez nous ». Une machine de guerre, en somme, mise au service de Zemmour et Le Pen.
Et puis voici que ce peuple, dont on exaltait « le bon sens » et la détestation des immigrés, ne vote pas comme prévu. On glose souvent sur le pouvoir irrésistible des médias : une fois encore, le cliché est réfuté. Après s’être échiné pendant des années à faire passer le RN pour « un parti comme les autres », à récuser laborieusement le terme même d’extrême droite sur ses antennes, à mener une « guerre culturelle » théorisée par des philosophes commandités, le groupe Bolloré bute… sur la résilience républicaine.
Il croyait toucher au but au vu des résultats du premier tour. Las ! Ce front républicain dont il se moquait sans cesse a de nouveau fait la preuve de son efficacité. Droite, centre et gauche se sont coalisés pour écarter l’extrême-droite du pouvoir, ce qui tend à prouver que la patiente entreprise de dédiabolisation menée sur CNews, sur Europe Un et dans le Journal du Dimanche débouche sur un flop retentissant. Eh oui ! Le RN fait toujours peur à une majorité de Français, il n’est pas prêt à gouverner et l’entre-deux tours a exposé au vu de tous l’inanité, ou la nocivité, d’un nombre considérable de candidats RN racistes, ignares, extrémistes, ou les trois à la fois. Jusqu’à la défaite de Nicolas Dupont-Aignan, complotiste frénétique et antivax forcené, dont les idées ont pourtant été promues avec application par le même groupe.
Le tout en raison d’un phénomène que Vincent Bolloré n’avait pas prévu : même soumis à une propagande systématique, les citoyens gardent leur libre-arbitre et refusent de se faire dicter leur choix par les médias de la réaction, et encore moins par le milliardaire qui les tient en laisse.