Écologie : allo Matignon ?
Le président de la Nouvelle-Aquitaine a écrit, à Gabriel Attal pour l’interroger sur la transition énergétique des territoires… sans réponse
Les engagements de l’État sur la transition écologique et énergétique des territoires sont-ils, à petits pas, mais sûrement, remis en question ? C’est la question que pose Alain Rousset, dans une lettre adressée au Premier ministre voilà plus d’un mois déjà et, à ce jour, restée sans réponse.
Ces engagements ont été pris au cours des COP territoriales qui visent à doter le pays d’une stratégie nationale, région par région, pour réduire de 55 % nos émissions de gaz à effet de serre (GES) d’ici à 2030 et protéger la biodiversité. Ces COP mobilisent pour ce faire les acteurs locaux institutionnels (régions, départements, intercommunalités, préfectures) économiques et la société civile.
Initiative positive, donc, mais selon Alain Rousset : « En quelques mois, les différentes annonces gouvernementales viennent détricoter les maigres progrès environnementaux faits collectivement. Il est plus que jamais urgent de maintenir le cap et de ne pas revenir sur 20 ans de politiques environnementales ».
Il insiste particulièrement sur trois points : l’avant-projet de loi sur la souveraineté énergétique, la biodiversité et la santé humaine, enfin la production agricole.
Pour lui l’avant-projet de loi « n’apparaît pas à la hauteur du défi, comme l’illustre la suppression de l’objectif de part d’énergies renouvelables dans la consommation brute d’énergie pour 2030, ainsi que celui de rénovation de l’ensemble du parc immobilier. La souveraineté énergétique ne pourra passer, d’ici 2030, que par les économies d’énergies et les énergies renouvelables ».
Sur la biodiversité et la santé humaine, le président de la région Nouvelle-Aquitaine estime que « les annonces que vous venez de faire sont à contre-courant de l’approche « une seule santé » et ne feront qu’alourdir les investissements massifs que doivent réaliser nos collectivités locales pour épurer l’eau afin de la rendre potable ». Et il s’alarme sans langue de bois « je pense que nous encourons d’ailleurs un risque pénal tant les preuves scientifiques de pathologies liées à ces usages sont patentes ».
Enfin vient la question des productions agricoles. Pour le président de la région Nouvelle-Aquitaine, « les agriculteurs ont parfaitement conscience de la nécessité de la transition agroécologique. La vraie question est celle de leur accompagnement particulièrement sur la mise à disposition d’alternatives. […] Garantir aux agriculteurs un revenu décent et le droit de vivre de leur travail est essentiel. Et les solutions existent : application de la loi Egalim, droits de douane, productions énergétiques, paiements pour services environnementaux… »
En conclusion, il dresse un constat désenchanté : « Le 1er décembre, j’ai participé au lancement de la COP territoriale Nouvelle-Aquitaine aux côtés du ministre Christophe Béchu, en soulignant l’intérêt de cette démarche transversale de planification écologique censée nous fixer un cap collectif pour 2030. Pourtant je ne vois que des annonces qui vont dans le sens contraire des leviers identifiés par votre Secrétariat général à la Planification écologique ».
À ce jour, pas de réponse à cette lettre alors que le Premier ministre annonçait ostensiblement, lors de sa nomination, vouloir insuffler à l’action publique rapidité, efficacité et sens de l’écoute. Est-il enlisé dans la boue des chemins ruraux et des champs en jachère ? Est-il dans l’effroi provoqué par des contraintes budgétaires toujours plus pesantes ? Est-il immobilisé par des arbitrages impossibles à rendre ?
Mais le plus important n’est pas là. La remise en question de cette démarche serait un coup probablement fatal porté à la crédibilité de la parole de l’État. Le tissu institutionnel et politique territorial y résisterait-il alors que ne cessent les démissions d’élus ?