Élections en Espagne : faute de genre

par Yoann Taieb |  publié le 04/06/2023

La gauche a perdu les élections municipales et régionales en Espagne la semaine dernière. Une défaite qui pourrait s’expliquer, entre autres, par une loi qui a choqué l’opinion

Manifestation en faveur de la nouvelle loi sur le genre en Espagne- Photo Celestino Arce/Nur

Comment expliquer la cinglante défaite de la gauche en Espagne la semaine dernière ? Dans un contexte international difficile, tous les voyants sont au vert, l’économie espagnole prospère et le gouvernement peut se targuer d’un bilan positif. Alors ?

Alors, il faut regarder du côté sociétal avec le vote en février d’une loi permettant de changer de genre dès 16 ans. Un combat du parti radical de gauche, Podemos, dite « loi transgenre ». Le texte va permettre à ceux qui le souhaitent de modifier, dès 16 ans, leur genre sur leurs documents d’identité grâce à une simple déclaration administrative.
Sans aucune obligation de justifier ce choix via des attestations médicales de médecins signalant une dysphorie de genre.

La loi permet aussi aux mineurs, entre 14 et 16 ans, accompagnés par leurs tuteurs légaux, et à la tranche 12-14 ans de faire la même démarche, avec autorisation de la justice. La ministre de l’égalité, Irene Montero (Podemos) s’est félicitée d’avoir « fait un pas de géant » et s’est dite prête à « laisser sa peau » pour que ce projet voie le jour.

Cette avancée majeure pour les uns a pourtant provoqué de grandes divisions au sein même de la majorité socialiste du Premier ministre Sanchez, Carmen Calve, première vice-présidente du gouvernement, a déclaré qu’elle était « préoccupée par l’idée que le genre se choisisse sur la simple base de la volonté ou du désir » Les féministes se sont aussi montrées sceptiques, craignant que des hommes s’identifiant comme des femmes, puissent participer à des compétitions sportives féminines ou se faire incarcérer dans des prisons pour femmes.

La loi « trans » fait les affaires de la droite. Une députée du Parti Populaire, Maria Jésus Moro, déclarait que les élus ne sont pas là pour « faire des expériences avec les gens (…), des pays font machine arrière parce qu’ils voient désormais qu’ils se sont précipités, ce qui a provoqué beaucoup de souffrance ».

Les Espagnols semblent plus concernés par les sujets économiques et leur quotidien que par les sujets sociétaux. En cela, la gauche sociale-démocrate de Sanchez s’est laissée entraîner dans la défaite par un allié radical qui n’a pas su capter les attentes des Espagnols.

On ne peut pas aller trop vite, trop loin. Un avertissement avant les élections législatives anticipées de juillet prochain. Et une leçon à méditer pour la gauche française.

Yoann Taieb