Émeutes : le grand vertige du gouvernement
Une rapide plongée dans l’ombre des cabinets ministériels, à Matignon et à l’Élysée, révèle l’inquiétude du gouvernement et la prise de conscience – tardive – de ses manquements politiques
Les coups de communication gouvernementaux ne font pas des miracles : « Plan des territoires », « France ruralités » , « Printemps des quartiers », « Quartiers résilients »… toutes ces opérations aux noms flous et technocratiques ne portent pas l’espoir et ne donnent aucun résultat. Une incertitude de l’instant qui se traduit jusqu’au sommet du pouvoir où l’on craint le pire tant l’embrasement semble incontrôlable.
« Chaud et peut-être pire que les retraites » souffle, pessimiste, un conseiller de Matignon, bien placé et qui rappelle que l’exécutif a déjà bien « dégusté » durant l’épisode de la réforme impopulaire. À Élysée, une source souligne l’état de tension et l’hyperactivité dominante : « Personne n’a dormi depuis 4 jours . Stressant ! »
Pour une autre conseillère de cabinet, ce moment politique va « soit stopper toute idée de remaniement immédiat et le reporter aux calendes grecques, soit convaincre le président de mettre la barre à droite définitivement pour mettre le paquet sur la sécurité ».
Ainsi, pendant que le petit monde politique s’agitait depuis des semaines autour du remaniement, des accords concernant la majorité et du meilleur candidat-président en 2027… il a oublié l’essentiel : agir au quotidien et concrètement. Aujourd’hui, c’est peut-être l’émeute qui va décider ou non du tournant sécuritaire du gouvernement. Révélateur.
Au cœur de la crise, la banlieue, angle mort de la politique française depuis des années, ne date pas du premier mandat d’Emmanuel Macron. Le gouvernement parle travail, économie, industrie et Europe mais jamais banlieues, égalité de l’accès à l’éducation, accès aux études, à l’emploi ou à la culture.
En réalité, le macronisme manque de vrais politiques, en clair, de gens issus du terrain, d’élus locaux, pour comprendre les phénomènes à l’œuvre et simplement parler aux gens. « À force de ne parler qu’aux gens qui leur ressemblent » résume une assistante expérimentée « à force de ne pas vraiment s’occuper des petites gens, on se retrouve dans un engrenage ultra violent ».
Le sentiment général est que, plus qu’une révolte contre la mort d’un jeune, c’est celle d’une partie de la France qui ne se reconnaît dans aucun de ses représentants.
La violence dans les rues ne se maîtrise pas de la même manière que celles des cortèges de manifestants. L’exécutif se trouvait déjà dans une impasse politique, il risque de payer cher d’avoir gouverné les yeux fermés.