Et la gagnante est… Marine Le Pen
Les palinodies qui rythment la recherche d’un Premier ministre, tandis que les décisions budgétaires sont de plus en plus urgentes, profitent par nature au parti qui se tient à l’écart : le RN.
Marine Le Pen a écrit aux chefs de groupes parlementaires pour demander une session extraordinaire du Parlement dont l’ordre du jour serait consacré… aux finances de la France. Instruite par sa cruelle déconvenue aux législatives, la cheffe du RN a manifestement décidé de poursuivre et d’accentuer son entreprise de « dédiabolisation ». Ainsi, plutôt que de polémiquer contre « le système », de déblatérer contre Macron, Mélenchon ou tout autre personnage ennemi, elle joue la carte du sérieux, de la modération et de la responsabilité.
Au-delà de la manoeuvre, perverse et transparente (elle ne cesse par ailleurs de dénoncer la « dictature bruxelloise » qui prêche justement le redressement budgétaire), on doit souligner que cette astuce politicienne recouvre un vrai problème : les finances de la France sont en très mauvaise posture, ce qui devrait faire réfléchir tous les partis, notamment les plus dépensiers. Après un déficit de 5,5% du PIB en 2023, il appert que celui de 2024 sera encore supérieur. Rappelons que ce pourcentage est calculé par rapport au produit global de la nation. Si on le compare aux recettes fiscales, elles-mêmes en baisse, on s’aperçoit que l’État français a des dépenses qui dépassent les recettes de beaucoup plus en proportion, ce qui l’oblige à emprunter massivement sur les marchés.
Ainsi le RN prend les gants de déplorer hautement la mauvaise tenue des comptes publics (alors que son programme les aurait aggravés). En apparence, donc, la droite national-populiste apparaît comme une force de stabilité et de sérieux, en regard du désordre instauré par la dissolution Macron et par l’impéritie des partis qui furent partie prenante au « Front républicain » employé avec succès pour le priver de sa victoire annoncée. Force tranquille d’un côté, faiblesse anarchique de l’autre. Depuis l’avènement d’Emmanuel Macron, le RN a gagné quelque huit points dans les scrutins nationaux, jusqu’à menacer de remporter une majorité à l’Assemblée. On voudrait le faire progresser encore qu’on ne s’y prendrait pas autrement. Sera-ce là le véritable héritage d’Emmanuel Macron ?