Etats-Unis/Europe: ceux qui votent à droite meurent plus jeunes…

publié le 24/04/2023

L’espérance de vie est nettement moindre aux États-Unis qu’en Europe. Les causes en sont très politiques

L'espérance de vie d'un Américain né en 2017 est évalué à 78,6 ans. [SPENCER PLATT / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP]

.Si l’on cherche un argument décisif contre le conservatisme, on le trouvera dans une série de chiffres aussi éloquents qu’implacables : ce sont les statistiques de l’espérance de vie aux États-Unis, comparées à celles de l’Europe. Cette conclusion se trouve dans l’excellente « lettre de New York » écrite il y a peu dans Le Monde par Arnaud Leparmentier, correspondant aux États-Unis.

« L’espérance de vie américaine, écrit ce journaliste, est en chute libre depuis plusieurs années. Elle s’établissait à 76,1 ans en 2021, soit le plus bas niveau depuis 1996, selon les données du NCHS (Centre national de statistiques sur la santé) de 2022. Le recul depuis 2019 est de 2,7 ans, du jamais vu depuis le début des années 1920, et le Covid-19 n’explique pas tout. »

Pour mémoire, l’espérance de vie dans l’Union européenne se situe en moyenne à 81,3 ans. Pourquoi cette différence de cinq ans, qui ne cesse de s’accroître, alors même que le niveau de vie aux États-Unis est supérieur à celui des Européens et que les dépenses de santé y sont nettement supérieures (18% du PIB contre 12% chez nous) ? Pour une raison fort simple, que Leparmentier détaille sans la formuler explicitement, mais qui saute aux yeux quand on le lit : l’Europe est plus à gauche que les États-Unis.

On le comprend en énumérant les causes de la surmortalité qui sévit aux États-Unis : la mauvaise santé des classes populaires (obésité, malbouffe, drogue), liée à l’absence d’un État-providence digne de ce nom ; le nombre des homicides (cinq fois supérieur aux États-Unis) ; les attaques contre le droit des femmes, notamment la restriction de l’IVG et la fermeture des maternités, qui accroissent le nombre des grossesses difficiles ; et enfin la discrimination raciale : les Amérindiens et les Afro-américains, qui sont aussi les plus pauvres, ont une espérance de vie très basse.

Or sur tous ces sujets, la droite américaine mène des campagnes agressives qui accroissent sans cesse les causes de la surmortalité. Au nom d’un libéralisme dogmatique, elle lutte pied à pied contre toute extension de la couverture sociale des Américains. Au nom du droit à l’autodéfense, elle plaide pour la vente libre des armes à feu, y compris les plus dangereuses. Au nom des traditions religieuses, elle cherche à réduire sans cesse le droit des femmes. Au nom de l’État minimal, elle freine l’intervention publique en faveur des minorités ethniques.

Et si l’on veut une confirmation encore plus claire, il suffit de comparer les mêmes statistiques d’un état américain à l’autre, ce qu’a fait le prix Nobel d’économie et chroniqueur du New York Times Paul Krugman : la situation est nettement plus mauvaise dans les états gouvernés par des Républicains que dans ceux où dominent les Démocrates.

Résumons le diagnostic : les conservateurs américains ont empêché l’État-providence de se développer, ils ont bloqué la lutte contre les armes à feu, ils ont tout autant freiné le combat pour les femmes ou pour les minorités. Résultat : grâce à la droite, les Américains ont perdu cinq années de vie en moyenne par rapport à l’Europe.

En un mot : vive la tradition !