« Existentiel »
Novlangue. De Newspeak, George Orwell, « 1984 ». Langage convenu et rigide destiné à dénaturer la réalité.
La vie ? Sa genèse est devenue douteuse, sa cause inatteignable, sa raison nébuleuse.
La mort ? Elle ne peut plus se concevoir que dans l’angoisse de la néantisation de l’individu-roi. « Mort m’est vie », posait la belle maxime des aïeux du Charlus de Proust ? Terminé : mort nous est mort.
Ce double constat place au cœur de la pensée contemporaine la sacro-sainte existence, la présence au monde.
Dès lors, la paire adjectivale « vital/mortel » se voit logiquement évincée par l’horripilant « existentiel ».
Le contemporain ne court ni risque vital ni risque mortel, il ne se voit objecter ni sujet vital ni sujet mortel, il ne fait face à aucun enjeu vital, à aucun enjeu mortel…
Caserné, confiné dans « l’être-là », dans la présence, il se heurte à ses parois positives qui le protègent mal d’un mystère devenu au mieux accablant, au pis terrifiant.
Qu’elle la précède ou non lui importe en somme fort peu : l’existence le protège de l’essence.
Baigner dans l’existence ? C’est existentiel !