Fin du mois, fin du monde, fin des mômes ?
Le nombre de naissances en France n’a jamais été aussi bas depuis la Seconde Guerre mondiale. La faute à l’éco-anxiété ?
En 2022, selon l’INSEE, 725 997 nouveau-nés seulement ont vu le jour, 2,2 % de moins qu’en 2021. La population française continue, néanmoins, de croître. Après 1945, la période des « boomers » a compté près de 900 000 naissances par an. Après mai 68, ce chiffre a même été dépassé. Il diminue dix ans plus tard, et esquisse une petite remontée vers le milieu des années 80. Mais, depuis les années 2010, les naissances ont chuté de 12 %.
L’Union européenne connait le même phénomène, plus accentué. La moyenne des baisses des naissances s’établit en 2022, par rapport à l’année précédente, à 4,9 %. Ce pourcentage s’élève à 10 % dans les pays baltes ou en Grèce, dépasse 7 % en Allemagne ou 6 % aux Pays-Bas.
La natalité française, meilleure que beaucoup d’autres
La France pourrait tirer satisfaction d’une moins mauvaise situation. Mais aucun critère démographique n’incite à l’optimisme : ni le taux de fécondité des femmes, ni l’augmentation de l’âge auquel les femmes accouchent de leur premier enfant, ni la croissance du nombre de décès en train de rattraper peu à peu celui des naissances, ni l’espérance de vie qui stagne voire commence à reculer dans certaines régions.
Ce phénomène peut certainement se rattacher à la multiplicité des crises survenues depuis dix ans et notamment à une prise de conscience de la finitude de la planète et de ses ressources. Cette « éco-anxiété », ignorée des anciennes générations, a gagné les plus jeunes d’entre nous.
Une conjonction de menaces assombrit l’avenir de chacun. Le réchauffement climatique amène sécheresses, inondations, tornades, fonte des glaciers, élévation du niveau des mers. La virtualisation accélérée des activités laisse entrevoir de redoutables bouleversements sociaux.
L’angoisse des jeunes crée une mobilisation salutaire
Le chaos géopolitique du monde effraie. Des questions qui apparaissent insolubles remettent en cause les finalités de nos parcours, nos comportements, nos vies. L’angoisse des jeunes crée une mobilisation salutaire, mais elle a un revers : ne plus désirer d’enfants, ne plus vouloir les inviter à vivre dans un tel monde, ne plus désirer se reproduire.
Cette tentation engendre un climat de pessimisme délétère. Elle sonne la fin de l’Humanité. Elle décrète la perte du combat contre les dégâts anthropiques que nos générations ont causés.
Mais le monde ne se réduit pas à la vieille Europe. La jeunesse des pays en voie de développement, en Afrique notamment où près de la moitié de la population a aujourd’hui moins de quinze ans, n’attend pas de nous un repli égoïste sur nous-mêmes, mais que nous les aidions à mener ce combat. D’autant plus fortement que notre monde occidental développé est le premier responsable de cette situation. Ni leçon de morale, ni culpabilité historique, ni optimisme naïf dans ce propos, mais une nécessité : celle de repenser entièrement l’aide internationale.
Tout difficiles que soient les fins du mois et la perspective de la fin du monde, ne sont-ce pas nos mômes qui nous aideront à les vivre et à les surmonter ?