Front républicain : la résurrection
Contre toute attente, et notamment celle du RN, la classe politique retrouve une partie de ses réflexes d’antan. Tout n’est pas perdu…
Un rayon d’espoir, une lumière ténue au bout du tunnel… Contrairement au cliché entretenu depuis des années par une certaine doxa médiatique, ce bon vieux « front républicain », qu’on tenait pour une vieille carne épuisée, a retrouvé une incontestable vigueur. Tel un cheval de labour soudain revigoré, ce brave auxiliaire peut nous tirer du fossé où nous semblions verser irrémédiablement. Des centaines de désistements, émanant du PS, des écologistes, des communistes, et même de la France insoumise, dans le but d’éviter des triangulaires favorables au RN ; une réciproque souvent hésitante, embrouillée, byzantine, mais une réciproque tout de même consentie par les macronistes, qui permet à ces deux coalitions d’envisager l’avenir avec une moindre angoisse : voilà la nouvelle qui rend un début de confiance à tous les démocrates.
À noter tout de même : la défection républicaine… des Républicains, en tout cas de la part de ceux qui préfèrent manifestement voir le RN gagnant plutôt que voter pour quiconque venu de la gauche. La droite française a perdu son magistère et son idéologie. Pour une partie de ses élus, ou de ses candidats, elle est en passe de perdre ses valeurs, qu’on pensait pourtant issues du gaullisme, du libéralisme ou de la démocratie chrétienne, toutes doctrines incompatibles avec l’intolérance nationaliste. Que n’écoute-t-elle sa vice-présidente, Florence Portelli, qui est une femme debout, à la différence de ses collègues désormais affaissés à l’horizontale !
Un « parti comme les autres » ?
Le Rassemblement national aime à se présenter en « parti comme les autres ». Est-ce le cas, si tant de responsables de gauche, du centre et parfois de la droite, préfèrent voter pour leurs adversaires traditionnels plutôt que pour une ou un lepéniste ? N’y a-t-il pas là l’indice que l’opinion majoritaire voit toujours ce parti comme une formation extrémiste et dangereuse ?
Ce n’est pas le cas des électeurs, répondront les partisans de Bardella. C’est tout à fait juste, mais pour un tiers seulement des Français. Encore et toujours, malgré la percée spectaculaire qui s’est produite dimanche dernier, les deux tiers des électeurs souhaitent une autre voie que celle de Marine Le Pen.
On nous vole l’élection ! crient encore ses partisans. On ne vole rien du tout, au vrai. On essaie seulement de faire coïncider la représentation nationale avec cette réalité politique : la majorité des Français qui se sont exprimés dans ce premier tour ne veulent pas du RN. C’est le miroir déformant du scrutin majoritaire qui laisse à penser le contraire. Tel est le point essentiel. Reste maintenant à confirmer ce sursaut dans les urnes, ce qui est l’apanage des citoyens et non des responsables politiques. On paraphrasera pour une fois le marquis de Sade qui, en dépit de ses turpitudes, avait la sens de la formule : Français, encore un effort pour rester républicains !