Glucksmann: les conditions d’un succès

par Jean Peyrelevade |  publié le 29/03/2024

Raphaël Glucksmann a-t-il une chance de devenir un acteur décisif? Sans doute, mais sous conditions.

Jean Peyrelevade- Photo STEPHANE DANNA / AFP

La première est qu’il réussisse sa campagne pour les élections européennes à venir, en affirmant fortement ses convictions : renforcement de l’unité et de la souveraineté européenne, développement d’une capacité de défense commune, solidarité avec l’Ukraine, actions coordonnée pour la révolution climatique, conception d’une économie, notamment industrielle, mieux intégrée, capacité accrue d’emprunts et d’investissement au niveau de la Commission.

Pour l’instant, cela n’est pas mal parti. Mais comment définir le succès ? Que la liste conduite par Raphaël Glucksmann arrive nettement en tête par rapport aux listes concurrentes de l’ex-Nupes et contribue ainsi à marginaliser LFI, à supprimer définitivement l’emprise de Jean-Luc Mélenchon, de la gauche extrémiste sur la gauche sociale-démocrate qui, en France, n’a jamais pu jusqu’à présent s’affirmer comme telle. De même, cette victoire permettrait de convaincre les militants écologistes que le succès de leurs idées n’est possible que si elles sont partagées au sein d’une gauche de gouvernement rassemblée.

Le devoir des sociaux-démocrates est donc de voter pour la liste de Raphaël Glucksmann. Et je regrette que Bernard Cazeneuve ait jusqu’à présent refusé de se prononcer, affaiblissant de ce fait sa propre position politique.

Le combat, en effet, ne fait que commencer. Si Raphaël Glucksmann ne réalise qu’un demi-succès, son action sera qualifiée d’échec par Olivier Faure, premier secrétaire du Parti Socialiste, qui se débarrasserait ainsi d’un concurrent potentiel. À l’inverse, une réussite indiscutable sera présentée par le même Olivier Faure comme le résultat de ses propres décisions, et lui permettrait de renforcer son pouvoir. Ou, en tout cas, d’essayer de le faire.

Après les élections européennes, les sociaux-démocrates et réformistes auront donc un deuxième défi à relever. Il faut  mettre fin à l’opportunisme d’Olivier Faure de façon à pouvoir regrouper dans une même formation tous les partis ou mouvements qui veulent construire une vraie gauche de gouvernement.

Olivier Faure veut le pouvoir, pour lui. Depuis qu’il le dirige, le Parti Socialiste n’a produit aucun programme digne de ce nom, ni fourni de réponse crédible aux principaux défis que nous avons à relever. Et comment faire confiance pour mener une rénovation à un soi-disant leader qui s’est soumis à Jean-Luc Mélenchon avant d’être obligé, à son corps défendant, de s’en séparer ?

D’où le second objectif : que les vrais sociaux-démocrates gagnent le prochain congrès du parti socialiste afin de l’ouvrir très largement à tous ceux qui partagent nos objectifs. Pour ce faire, compte tenu de l’étroitesse de la victoire d’Olivier Faure au dernier Congrès à Marseille, un moyen simple est à notre portée.

Que tous les militants concernés, qu’ils soient membres de la Convention de Bernard Cazeneuve, de Place Publique de Raphaël Glucksmann ou de tout autre mouvement similaire adhèrent le plus vite possible au Parti Socialiste, non pour le consolider en l’état, mais pour le changer et surtout l’élargir. On a besoin à la tête du Parti Socialiste rénové non pas d’un poisson navigateur qui essaie de s’adapter à toutes les situations possibles et imaginables, mais d’un vrai social-démocrate.

Jean Peyrelevade

Editorialiste