Gouvernement pour la France ou casting électoral ?
Oublié le temps des experts ou des membres de la société civile. Voici venu celui des politiques. Une obsession : limiter les dégâts aux élections européennes
La nomination de Gabriel Attal, 34 ans, au poste de Premier ministre, avec celle dans la foulée de Rachida Dati comme ministre de la Culture, ont-elles rempli leur promesse, celle de donner le sentiment aux Français qu’au gouvernement, tout a changé ? Exit la peu charismatique et très technocratique Élisabeth Borne, place à des personnalités plus extraverties du nouveau et de l’Ancien Monde, capables d’aller affronter aux élections européennes Jordan Bardella à droite, Raphaël Glucksmann à gauche.
Pourtant, à y regarder de plus près et en attendant la seconde fournée des ministres délégués et des secrétaires d’État, dix des quinze ministres qui composent le nouveau gouvernement, y figuraient déjà. La plupart conservent leur portefeuille, en particulier ceux qui pèsent le plus lourd : Bruno Le Maire à l’Économie, qui élargit encore ses responsabilités avec l’Énergie, Gérald Darmanin à l’Intérieur, Sébastien Lecornu aux Armées et Éric Dupond-Moretti à la Justice.
Gabriel Attal, jeune et populaire est certes promu pour rafraichir l’ensemble. Quant aux nouveaux venus, deux sont des professionnelles expérimentées de la vie politique clairement à droite. Que ce soit Rachida Dati, proche de Nicolas Sarkozy à la Culture, ou Catherine Vautrin au ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, ex-LR qui a derrière elle une longue expérience d’élue. S’y ajoutent Stéphane Séjourné à l’Europe et aux Affaires étrangères, un tout proche d’Emmanuel Macron dont il a été le conseiller politique. Et Marie Lebec aux Relations avec le Parlement, un an de moins qu’Attal, pure macroniste, qui aura fort à faire à l’Assemblée nationale où le gouvernement n’a pas de majorité.
Petite cuisine
Cette petite cuisine laisse dubitatif quant à la qualité des plats. Le fond de sauce devrait rester à peu près le même. Certes les ingrédients sont différents. À cet égard, il faut aussi considérer les remerciés. La plupart étaient des figures de l’aile gauche de la Macronie, à commencer par un des ex-favoris du Président de la République, Clément Beaune, sanctionné pour avoir critiqué la loi sur l’immigration. Pas bien ça !
Ce penchant affirmé à droite aura-t-il des conséquences sur l’unité du groupe Renaissance au Parlement ? L’aile gauche peut-elle renâcler ? Autre fragilité, la constance de l’allié Modem. L’incontournable François Bayrou, silencieux, est, dit-on, contrarié par les nominations à la fois de Gabriel Attal et de Rachida Dati. En clair, il boude.
Emmanuel Macron a repris la main après la claque de la motion de rejet sur l’immigration. Il pense faire preuve d’habilité en musclant sa droite et en déstabilisant un peu plus les LR, dont il espère attirer une partie des 58 députés. Il nomme des fidèles, élimine les « frondeurs» et affirme son autorité plus « Jupiter » que jamais. Aveu de faiblesse ou coup de génie ? En tout cas, éminente prise de risque. Le gouvernement peut perdre à gauche de sa majorité ce qu’il espère gagner à droite.
Quant aux Français, ils ne semblent pas très intéressés par ces subtilités. Ils aimeraient surtout savoir si le gouvernement va confirmer la hausse du prix de l’électricité de 10 % au 1er février. Une augmentation totale de 39 % en un an. Broutille.
Que va dire Attal sur le sujet ?