Grèce : le vent, le soleil et la mer

par Jean-Paul Mari |  publié le 30/04/2023

Energies renouvelables. Malgré une crise financière qui a terrassé le pays, la Grèce a su mettre à profit ses atouts méditerranéens pour réussir le tour de force de couvrir plus de 40% de ses besoins en électricité grâce à l’énergie verte. Quant à la France…

Eoliennes - île d'Euboea près du Mont Ochi - Photo by Wassilios Aswestopoulos/ NurPhoto-

Sur la route qui mène d’Athènes à Delphes, deux choses frappent. D’abord, un paysage de Grèce antique, un précipice vertigineux à gauche, une citadelle de roches à droite et, perchée entre les deux, la cité antique de Delphes, dont les ruines surveillent le canyon et l’accès par la mer. Majestueux et dominateur. On dit qu’il suffit de se poster là, quand l’aube « aux doigts de rose » fait naître la lumière, pour rencontrer les dieux de l’Olympe.

Plus près du sol et des hommes, les collines de pierres qui bordent la route sont plantées de grandes flèches blanches de centaines d’éoliennes qui tournent au vent marin. Et dans les champs, entre deux plants de tomates et les oliviers, naissent des vergers modernes, rangées lumineuses de panneaux solaires qui couvrent des centaines d’hectares. En contrebas, les vagues de la méditerranée assurent le mouvement dynamique nécessaire à l’énergie marémotrice. Le vent, le soleil et la mer, toute la Grèce est là.

Au-delà de la carte postale de vacances, les énergies nouvelles sont devenues un des moteurs de la production électrique du gouvernement à Athènes. Le vendredi 7 octobre dernier, le pays a connu cinq heures de grâce en produisant assez d’énergie renouvelable pour assurer la totalité de ses besoins en électricité. Simple anecdote ?  

Au contraire, c’est le résultat d’une politique de transition qui a débuté en 2013, à l’aube de la crise financière qui a ébranlé le pays. Malgré le séisme économique, Athènes a couvert 46¨du mix énergétique — électricité, chauffage, climatisation, etc. — pendant six mois entre janvier et août. Dix ans plus tard, les énergies nouvelles fournissaient toujours 42 % des besoins sur la même période.

Sur le plan financier, la Grèce a certes obtenu un gros coup de pouce de l’Europe de plus de deux milliards d’euros, mais elle s’est elle-même engagée à investir une partie du plan de relance post-Covid dans la lutte contre le réchauffement. Objectif : produire 67% de son électricité à partir du renouvelable d’ici à 2030 contre 30 % aujourd’hui. Dans le même temps, le recours au charbon n’a cessé de décliner et l’énergie verte a relégué pour la première fois le gaz — russe à 40% — au second plan. Et depuis le 19 avril, les premiers bus à hydrogène sont déjà en exploitation sur une ligne régulière au cœur de la capitale.

Ne cherchez pas à Athènes les grands discours sur l’écologie ou l’Apocalypse à venir, les Grecs se veulent pragmatiques et ont simplement décidé que leur économie énergétique devait s’appuyer sur la réalité méditerranéenne de leur pays.

Quid des autres pays qui ne possèdent pas tous ces atouts ? L’Islande, qui n’est pas connue pour ses plages torrides, est devenu en 2017 le premier pays à couvrir 100% de ses besoins grâce à la géothermie de ses sources chaudes. L’Écosse, elle, a su profiter de ses vents glacials pour se réchauffer et atteindre 97% dès 2020. Quant au Portugal, brûlé par le soleil, ses panneaux fournissent déjà 65% des besoins. Chacun cherche et trouve son chat.

Et la France ? La loi Climat, ambitieuse, a prévu 40% de la production d’électricité française issue des énergies vertes d’ici à 2030.Vaste pays, peuplé, industrialisé et engagé dans le nucléaire, la France  s’était fixée un cap modeste, de 23%, mais n’a réussi qu’à atteindre… 20% en 2020. Force est donc de constater que l’esprit de Delphes est plus efficace que l’intelligence de nos énarques parisiens.

Allez ! Encore un effort…

Jean-Paul Mari