« Incidence »
Novlangue. De Newspeak, George Orwell, « 1984 ». Langage convenu et rigide destiné à dénaturer la réalité
Les mots du développement durable sont loin d’être compréhensibles pour le commun des mortels. Et pourtant, ils évoquent une réalité simple : toute décision économique produit des effets, bons et mauvais, plus ou moins prévisibles sur la société et l’environnement.
A la fin des années 90, les promoteurs d’un développement économique soutenable ont invité états et organisations à identifier les risques et les conséquences que leurs activités, modes de production et de distribution pouvaient engendrer vis-à-vis des tiers.
Ces pionniers d’une économie plus vertueuse défendaient la vision d’une économie holistique, fondée sur une recherche d’équilibre entre les dimensions financière, écologique et sociale. Ils défendaient – contre vents et marées – l’idée révolutionnaire qu’une entreprise peut être tenue pour responsable, qu’elle peut être citoyenne, qu’elle peut se développer en s’inscrivant dans une démarche de progrès.
L’Accord de Paris sur le Climat en 2015 a marqué un tournant, le monde entier a pris conscience du naufrage écologique et climatique. Avec lui, les technocrates ont repris la main. La responsabilité sociétale de l’entreprise est devenue la durabilité, on ne parle plus de conséquences mais de « Principal Adverse Impacts » (PAI) ou incidences négatives principales.
Pourquoi incidence et pas conséquence ?
Parce que le terme incidence est le moins volontaire, le plus indirect, le plus évanescent et le plus inconséquent dans la gamme des effets. Il ne renvoie à aucune cause, ni décision, il suppose une absence de volonté particulière. Et neutralise précisément ce qu’il s’agirait d’évoquer avec sérieux.