Israël : Macron en zigzag

par Sylvie Pierre-Brossolette |  publié le 13/11/2024

En se rendant au match France-Israël, le Président fait un beau geste. Pour compenser des embardées mal comprises ?

Emmanuel Macron arrive à la cérémonie aux Invalides, le 7 février 2024, en hommage aux 42 français et franco-israéliens tués dans l'attaque contre Israël par le Hamas et aux 3 otages toujours retenus. (Photo Mustafa Yalcin / Anadolu via AFP)

On n’en finit plus de commenter les positions du chef de l’Etat français sur Israël, tant elles sont contrastées. Un jour il se veut le meilleur soutien de ce pays attaqué par les islamistes, un autre il a des mots très durs à son sujet, provoquant des réactions tout aussi diverses d’agacement ou d’approbation, que l’on soit juif, musulman ou ni l’un ni l’autre. A quoi joue Emmanuel Macron ? On peut certes vouloir combattre l’antisémitisme et critiquer l’action de Benyamin Netanyahou, mais les excès dans les paroles ou les gestes finissent par brouiller le message.

Ainsi, parfois en fait-il trop.  Si l’on applaudit à sa présence jeudi au stade de France en réaction au quasi-pogrom d’Amsterdam, d’autres réactions paraissent disproportionnées. On n’a toujours pas compris comment, au lendemain de l’agression du 7 octobre, le Président français comptait mobiliser une coalition internationale contre le Hamas. Louable intention, mais présomptueuse, et surréaliste compte tenu de la réalité des puissances en présence. On n’a pas saisi non plus comment le palais de l’Élysée s’était retrouvé le théâtre d’une cérémonie traditionnelle juive le 7 décembre dernier, le président allumant lui-même une bougie lors de la fête d’Hanoukka, une entorse au principe de neutralité de l’Etat. Deux exemples de maladresses, pour ne pas dire plus, dans le zèle que montre parfois Emmanuel Macron pour témoigner sa sympathie au peuple juif, que ce soit dans l’hexagone ou dans le monde.

Mais que d’impairs dans l’autre sens ! Cela a commencé avec sa décision de ne pas aller à la manifestation contre l’antisémitisme le 13 novembre 2023, lors de la grande marche qui a rassemblé tous les partis – sauf LFI – et plus de 100000 personnes à Paris, une absence blessante pour beaucoup et considérée comme une faute politique par la plupart des commentateurs. Cela a continué par une rafale de propos très sévères sur l’action du gouvernement israélien : on se rappelle que le Président a demandé qu’on cesse de livrer des armes à Israël, ; puis, dans le huis clos du conseil des ministres, il a semblé dire que l’ONU, qui avait participé à légitimer ce pays à sa création, pouvait lui  retirer sa bénédiction s’il ne respectait pas les règles ; enfin, répondant à Netanyahou qui évoquait une guerre de « la civilisation contre la barbarie », Macron a lancé : «  Je ne suis pas sûr qu’on défende une civilisation en semant soi-même la barbarie », mettant sur le même plan le Hamas et l’Etat juif. Pas étonnant que le nom du chef de l’Etat français ait été hué ensuite au diner du CRIF quand Michel Barnier l’a cité…

Emmanuel Macron, à qui personne ne fera le procès d’être antisémite ou hostile à Israël, joue avec le feu. On peut comprendre qu’il veuille exprimer son horreur face aux dizaines de milliers de morts civiles infligées par l’Etat hébreu. Mais la manière étrange qu’il a de souffler le chaud et le froid laisse parfois pantois. Est-ce pour exister médiatiquement ? Pour compenser la déclaration précédente ? Pour satisfaire à un goût irrépressible pour les formules ou les images fortes ? Toujours est-il qu’on a envie de lui dire : « Un Président ne devrait pas jouer avec cela ».

Sylvie Pierre-Brossolette

Sylvie Pierre-Brossolette

Chroniqueuse