Renzo Rosso, l’anti-Bernard Arnault italien

par Marcelle Padovani |  publié le 26/04/2024

Il a créé la marque Diesel et inventé un nouveau modèle d’entreprise dans le monde de la mode. Plus écologique, plus social…

Le designer et homme d'affaires italien Renzo Rosso-Photo Marco BERTORELLO / AFP

C’est le fils d’un paysan de Vénétie devenu un leader de la mode et du luxe. Renzo Rosso, 68 ans, est issu d’une famille luthérienne et épargnante du Nord Est de l’Italie. Enfant, il usait les jeans déjà portés par son grand frère. Aujourd’hui, des jeans, il en a vendu 110 millions, sous sa marque Diesel, connue du monde entier. Et ce n’est pas son seul record. Cet entrepreneur a mis sur le marché, en plus des vêtements, des chaussures, des parfums, des lunettes, tous participants du style sobre, de qualité qu’il privilégie.

En plus de Diesel, il a développé ou créé les sociétés Margiela, Marni, Viktor et Rolf, Jill Sanders, Staff International. Toutes regroupées dans le groupe international « Only The Brave » (OTB) qu’il préside. Chiffre d’affaires en 2023 : un milliard 900 millions d’euros et 7000 salariés. Stratégie : dépasser l’obsession du marché, de la concurrence, des superventes, pour faire d’OTB un nouveau modèle d’organisation entrepreneuriale basé sur l’innovation continue et la mise en œuvre de projets de projets sociétaux.

Une orientation marketing qui veut épouser les préoccupations de l’époque, avec une attention particulière pour les enfants, les jeunes, les femmes, les réfugiés, et l’écologie. Trois cent cinquante projets ont déjà été réalisés. Un exemple qui rappelle l’expérience d’Adriano Olivetti (mort en 1960) qui voulait faire de son entreprise une communauté où le travail, la production, n’était qu’une composante. On peut acheter de Montréal à Tokyo, de Paris à New York, des jupes originales dans un tissu de qualité, des jeans couteux, mais raffinés, des capes provocatrices, mais durables.

Ces vêtements prétendent raconter une histoire aux antipodes des géants de la mode et du prêt-à-porter. Renzo Rosso se revendique comme l’anti Bernard Arnault. Il prône un modèle de production léger, flexible, innovateur, soucieux de social. Un parti prix artisanal avec des produits modernes, férus de technologie, mais fabriqués par des entreprises de taille moyenne. De quoi sauver la tradition créatrice de l’Italie et d’ailleurs.

En France, Renzo Rosso s’est intéressé dès 2002 à Maison Margiela. Intéressé par la France et ce qu’il considère comme sa « modernité. » Il apprécie sa rencontre avec Martin Margiela qui a su décliner avec succès ses créations de la haute couture au prêt-à-porter, puis avec le créateur John Galliano qui a apporté sa « vision de couturier unique au monde ». Actuellement « présent dans les magasins des villes les plus importantes de France », Renzo Rosso se félicite aussi d’être « membre du board de la Fédération de la haute couture » et « juré de l’ANDAM Fashion Award », qui « récompense la vision des jeunes talents de la mode ». Artisanat, buts sociaux, entreprises de taille moyenne, le modèle Rosso est-il le ticket gagnant du nouveau luxe, en Europe et ailleurs .

Marcelle Padovani

Correspondante à Rome