La maison brûle

par Laurent Joffrin |  publié le 27/06/2024

Toutes les enquêtes convergent : le RN est en passe de devenir la force dominante de la politique française. Parallèlement, la gauche stagne…

Laurent Joffrin

La même chose, mais en pire… Tel le vaisseau de Dark Vador, indifférent aux inoffensives attaques que lui portent ses adversaires, le Rassemblement national s’avance inexorablement, gagnant des points dans tous les sondages, à 36 %, voire à 37 % dans au moins l’un d’entre eux. La plupart des projections lui prédisent une majorité relative, mais certaines, peu nombreuses, mais effrayantes, le créditent d’une majorité absolue.

On dira, à raison, que ces projections sont fragiles et qu’elles seront de toutes manières balayées et recalculées de fond en comble après les résultats du premier tour. Mais ces chiffres, qui tendent à converger en dépit des nuances entre instituts, montrent que les lepénistes ont pulvérisé leur soi-disant « plafond de verre » pour émerger en force dominante dans la vie politique française.

À cela s’ajoutent les « signaux faibles » émanant de témoignages directs, quoique disparates, sur telle ou telle circonscription : tous traduisent une sorte de libération des sentiments anti-élites, anti-mondialisation, anti-immigrés, anti-Europe, sans qu’aucun interdit moral ne vienne plus endiguer cette progression. Voilà une constatation qui exigera un examen de conscience approfondi. Autrement dit, si la victoire entière du RN n’est pas acquise, la maison républicaine brûle et ce n’est pas le moment de regarder ailleurs.

Surplace

Les autres formations stagnent, la macronie autour de 20 %, la gauche au-dessous de 30 %. L’ex-majorité relative est promise à devenir une minorité absolue, reléguée dans un second rôle au sein de la prochaine Assemblée ; la droite survit péniblement. Mais c’est le surplace de la gauche qui interroge le plus. Le Nouveau Front Populaire ne réunit pas le total des voix qui se sont portées sur ses composantes lors de élections européennes. À cela une seule raison, qui transparaît dans toutes les enquêtes : une bonne partie des électeurs qui ont voté Glucksmann sont rebutés par la présence de LFI dans la coalition ; ils sont confortés dans cette réticence par les incroyables dérapages du parti mélenchonistes depuis le 7 octobre. Cette méfiance est sans cesse ravivée par les déclarations du lider maximo, qui vient de conquérir le titre peu envié d’homme politique le plus impopulaire de France (sondage Odoxa).

Ce qui fait que l’habituelle « dynamique de l’union » ne se manifeste en rien. La gauche ne dépasse pas un petit tiers de l’électorat et si ces sondages se confirment, cela lui interdit tout espoir de victoire. Avec l’échec des rhétoriques anti-RN, voilà une deuxième leçon, qu’il conviendra de méditer avec rigueur.

Laurent Joffrin