La population de Gaza prise au piège

par Agnès Levallois |  publié le 06/12/2023

Où aller ? Le Nord est interdit et bombardé, le Sud a commencé à l’être. La bande de Gaza, déjà terriblement surpeuplée, se réduit toujours davantage…

Agnès Levalllois

Les bombardements sur la bande de Gaza redoublent d’intensité depuis la fin de la trêve le 1er décembre provoquant une situation humanitaire dramatique. Dramatique, car la force de frappe utilisée par l’armée israélienne atteint une violence inouïe.

Rappelons un chiffre, le siège de Sarajevo qui a duré quatre ans a provoqué la mort de 15 000 personnes. Le siège et les bombardements de la bande de Gaza ont déjà dépassé ce chiffre : près de 16 000 morts selon le ministère de la Santé du Hamas dont 70 % d’enfants et de femmes.

La première phase des opérations visait le nord de ce territoire exigu de 360 km2 et de 2,3 millions d’habitants, une des plus fortes densités au monde. Avant de bombarder Gaza city, l’armée israélienne a jeté des tracts demandant à la population de partir et de se réfugier dans le sud du territoire, ce qu’elle a fait dans sa grande majorité. Environ un million de personnes ont quitté leur maison.

Or, aujourd’hui, les bombardements visent Khan Younès où les Gazaouis se sont réfugiés à la demande de l’armée israélienne et, comble du cynisme, elle leur demande maintenant de quitter à nouveau les lieux pour aller vers Rafah, point de passage vers l’Égypte lui aussi bombardé.

Des tracts, avec des QR codes, sont distribués par voie aérienne pour conseiller des endroits où se rendre, mais pour cela il faut avoir accès à… internet et disposer d’électricité.

Les responsables israéliens ont déclaré que les combats à Khan Younès se concentrent sur des zones définies, d’où les civils pourront sortir, mais pas entrer. L’objectif est de cibler les infrastructures du Hamas, les hauts responsables de l’organisation, les centres gouvernementaux sans oublier la route de Philadelphie, considéré comme un « axe de contrebande » à Gaza, par lequel transite tout ce qui entre dans l’enclave palestinienne.

 Mais où les Gazaouis peuvent-ils se réfugier ? Nulle part. Sachant que la population de la bande de Gaza est constituée à 80 % de réfugiés de 1948, le spectre d’une deuxième nakba, catastrophe, est présent et traumatisant. Les Gazaouis n’entendent pas partir pour ne pas subir le même sort que leurs parents qui n’ont jamais pu revenir dans leur village d’origine.

L’objectif d’Israël est-il, après avoir contraint la population de quitter le nord de l’enclave ,afin d’en faire une zone tampon, de les regrouper dans le sud dans des conditions de vie inhumaines afin de les pousser à partir et qu’ils ne reviennent jamais ?

Mais la seule voie possible est la mer sous blocus de la marine israélienne… alors où peuvent-ils fuir les combats ?

Agnès Levallois – IREMO ( Institut de Recherche et d’Etudes Méditerranéenne et du Moyen-Orient )

Agnès Levallois

Editorialiste Etranger - Vice-présidente de l'IREMO