La semaine de Laurent Joffrin

publié le 30/09/2023

Chaque dimanche, un regard engagé sur une semaine d’actualité. Que retenir dans le flot d’informations qui inonde les médias, entre écume des jours et vague de fond? L’essentiel

Laurent Joffrin- Photo JOEL SAGET / AFP

Lundi

La manif anti-flics est un flop. Seul flip : trois policiers agressés. Pour le reste : de la flute… « Tout le monde déteste la police », criait-on. « Tout le monde », c’est peu de monde : à peine 9000 manifestants à Paris, des slogans stupides, des imprécations gratuites, une seule image pour le public : une voiture de police attaquée à coups de pierres et de barres de fer. « Que faisait-elle là ? » demande l’inénarrable Sandrine Rousseau. Juste remarque : plutôt que de patrouiller dans les rues, les policiers seraient mieux dans leur commissariat à taper le carton…

La manifestation se résume aux usuels indignés de l’extrême-gauche, elle choque les flics républicains (il y en a) et ne fait pas avancer d’un pouce la nécessaire réforme de la police. Une réussite de la France insoumise.

Mardi

Orchestré par les salafistes et les Frères musulmans, le bal des abayas est fini. Le Conseil d’État, pour la deuxième fois, a jugé l’interdiction légale et légitime. Une semaine après la circulaire ministérielle, cinq jeunes filles en tout et pour tout dans toute la France se sont présentées en portant ce signe religieux ostensible. Partout le dialogue a prévalu. Autrement dit, pour la quasi-totalité des familles musulmanes, l’école vaut bien une robe. La droite et l’extrême-droite agitent le spectre du « séparatisme ». Sincère ou contraint, c’est le civisme qui a dominé chez les musulmans. 

Mercredi

Ce mois de septembre est le plus chaud, mais le plan Macron pour le climat n’est pas le plus audacieux. Un début de planification, de bonnes mesures, 40 milliards prévus d’investissements. Sur le papier, cela va dans le bon sens. Reste à passer du papier à la réalité : ce n’est pas le fort de Macron le grand rhéteur et le petit faiseur. Il craint gilets jaunes et révolte rouge. Il craint surtout de bousculer ses propres dogmes qui lui commandent de ménager le marché, de protéger les profits, d’épargner les hauts revenus et les hauts patrimoines.  

Jeudi

C’est la vraie info de la semaine : un pays disparaît. Attaqué à l’arme lourde par les Azéris, le Haut-Karabagh s’est désagrégé. La résilience de cette enclave arménienne en Azerbaïdjan était insupportable au dictateur de Bakou, Aliev, un Ubu fils de son père, assis sur un puits de pétrole. Profitant de l’abstention de Poutine, volontaire ou forcée pour cause de guerre en Ukraine, il a décidé d’en finir avec ce petit peuple martyrisé par l’Histoire. Dans une vaste opération de nettoyage ethnique, il provoque par la terreur d’exil d’une population déjà asphyxiée par un blocus inhumain.

Les deux tiers des 150 000 Arméniens du Haut-Karabagh se sont enfuis cette semaine, baluchon sur l’épaule, vers leur étique mère patrie, la petite Arménie valeureuse et pauvre. Dix ou douze observateurs internationaux vont aller « évaluer les besoins humanitaires ». En raison de l’éloignement, au milieu d’un imbroglio géopolitique, les démocraties ne peuvent sérieusement intervenir. L’Histoire est impitoyable : l’avenir de l’Arménie démocratique est entre les mains de trois dictateurs, Aliev, Poutine et Erdogan.   

Vendredi

Nouvel attribut du folklore marseillais : la kalachnikov. Un sicaire sort d’un 4X4 en plein jour et rafale tranquillement trois hommes qui discutaient sur le trottoir. Deux sont morts, le troisième est blessé. Énième règlement de compte entre gangs, selon toutes probabilités. On incrimine le malheur des temps, la folie contemporaine, les instincts criminels de jeunes délinquants incontrôlables, etc.

La vérité est plus simple et plus effrayante. Étape après étape, le pouvoir des narcos s’installe sur le territoire national, à l’image de ce qu’il est en Amérique latine. Profits colossaux, violences sans limites, assorties de tortures pour faire régner la terreur, zone entières passées sous administration narco. Nous échappons pour l’instant à la corruption des policiers et des politiques, aux menaces directes contre l’État. Soyons tranquilles : cela viendra.  

Samedi

Veillée d’armes pour lejournal.info. Ce dimanche, notre quotidien se dote d’un hebdo du dimanche, sans surprise, appelé lejournal.info du dimanche. Dans un paysage dominical bouleversé par l’arraisonnement du JDD par Vincent Bolloré, il fallait une voix de gauche qui puisse se faire entendre à côté d’autres projets fort honorables, mais politiquement prudents. Le JiD défendra nos valeurs universalistes, républicaines, sociales, écologiques, selon sa manière : polémique et réfléchie, vive et argumentée. Dans l’actuel concert médiatique, les idées de progrès sont mal représentées et l’esprit des Lumières tend à s’effacer dans un débat vociférant où se heurtent toutes les intolérances. Nous avons décidé de résister, de lutter par l’ironie, la raison et le style.

Vous avez donc devant vous un hebdo à part entière, avec un grand entretien, portrait, enquête, et toutes sortes de nouvelles rubriques. Lisez-le ; jugez-le.