La victoire de l’identitaire
La religion, l’origine ou la couleur de la peau sont en train de prendre le pas sur les valeurs de la République…
C’est une défaite de la pensée. Aujourd’hui des citoyennes et des citoyens de la République française ont décidé qu’ils allaient voter en fonction de leur identité religieuse, culturelle, ethnique. La lutte des races aurait finalement et définitivement supplanté la lutte des classes. Quelle régression ! Lorsque Serge Klarsfeld annonce qu’au second tour des législatives, en cas de duel entre le nouveau Front populaire et le Rassemblement national, il votera pour le candidat de ce dernier, il parait renier toute une vie de combat anti-nazi. Mais pour lui, il s’agit simplement de choisir entre un parti antisémite et un parti pro-juif.
Son fils Arno, avocat, a depuis longtemps franchi le pas. Le philosophe Alain Finkielkraut est dans le même questionnement. Comme bien d’autres membres de la communauté juive révulsés par le ralliement de Raphaël Glucksmann et des siens à une union où LFI continue de jouer un rôle primordial. Jean-Luc Mélenchon et sa bande sont en effet considérés comme des antisémites avérés. Pour ceux-là, tout juif est un sioniste, un partisan de Netanyahou, donc un partisan du génocide des Palestiniens. Une essentialisation odieuse.
La querelle du leader insoumis avec Jérôme Guedj, député PS de l’Essonne, un de ses anciens proches est significative. En désaccord avec les positions de l’élu sur le conflit israélo-palestinien, Jean-Luc Mélenchon l’accuse dans un texte passablement confus d’avoir « renié les principes les plus constants de la gauche du judaïsme en France » sous prétexte qu’il ne condamnait pas Israël avec suffisamment de véhémence. Guedj serait plus juif que de gauche.
Réponse du socialiste : « Je ne suis pas un juif de gauche, je suis un universaliste ». Une notion qui n’a, semble-t-il, désormais aucun sens pour l’ancien militant trotskiste. Résultat : Jérôme Guedj a refusé l’étiquette de nouveau Front populaire pour se présenter aux élections, peu soucieux qu’il est d’associer son combat politique aux antisémites insoumis.
Pour les islamophobes, tout musulman est un islamiste, un soutien du Hamas, un partisan de la disparition d’Israël. Ces positions extrêmes dont la matrice est religieuse et ethnique, réduit la France a un territoire peuplé de sectes et de tribus qui au nom de leur dieu, voire de leur couleur de peau, ne rêveraient que de s’exterminer. Sur ce brasier, la France insoumise jette de l’huile en permanence. Et de son côté, le Rassemblement national prépare ses persécutions au nom de la préférence nationale.
Le retour du clivage gauche-droite, dans ces conditions, parait terriblement biaisé. Ce que nous sommes aurait désormais plus d’importance que ce que nous pensons. Toute forme de conscience politique serait nulle et non avenue. Cette terrible régression, cette négation du libre arbitre de chacun, conditionné dans ses opinions par sa religion, sa couleur de peau, ses origines géographiques enferme. L’identitarisme est liberticide.