L’audiovisuel public réformé à la va-vite
Le gouvernement est bien pressé de réunir radios, télés publiques sous une même autorité. Pourquoi un tel chambardement ?
Quelle mouche a piqué le gouvernement d’engager une réforme de l’audiovisuel ? Pourquoi en ce moment ? Pourquoi sous cette forme ? Il s’agit de rassembler l’ensemble des chaînes de radio et de télévisions publiques, incluant l’INA et France Média Monde, sous une même houlette, une holding. Une fusion interviendrait plus tard. Sur le fond, le numérique rapproche les différents médias. Il nécessite la mise en commun de services pour mutualiser un certain nombre de tâches et éventuellement concevoir des émissions utilisant à la fois le son et l’image notamment pour les plates-formes. En Grande – Bretagne, la réforme a été mise en œuvre. Tout le monde réfléchit à de telles évolutions.
Reste à savoir pourquoi la France est si pressée. Radio France est au firmament. France Inter est la première radio du pays. France Culture, occupe une place prééminente dans la vie culturelle. France Bleu a certes perdu des auditeurs, mais c’est rattrapable. Globalement, le service public radiophonique est parvenu à un niveau d’excellence. À France Télévisions, la présidente, Delphine Ernotte, poursuit son deuxième mandat à la satisfaction de tous. France 2, France 3, France 5, Culturebox et France Info, couvrent un large spectre qui permet au service public de bien remplir ses missions.
Lundi dernier, le rapporteur du projet de loi, Quentin Bataillon, député Renaissance de la Loire, a déjà envisagé la fusion de France 24 et de France Info. Or, France 24 a été créée pour augmenter la diffusion des informations françaises à l’étranger, « soft Power » oblige. Les problèmes de financement pourraient expliquer cette hâte réformatrice. La suppression de la redevance n’a pas été complètement compensée par un dispositif fiscal. Des propositions ont été faites à Bercy qui, en ce moment, cherche désespérément des ressources budgétaires pour combler le déficit de l’État.
Est-il nécessaire d’engager une partie de bras de fer avec les syndicats et le personnel qui s’opposeront à une réforme qui va bouleverser les habitudes et les organigrammes. Sans compter que réformer les structures coûte cher, et mobilise les énergies sur des questions internes alors que les Jeux olympiques, par exemple, nécessitent de grands efforts collectifs. À moins que le pari soit fait que personne n’osera e mettre en grève au moment des JO. À moins que l’on veuille remettre au pas des équipes, souvent critiques à l’égard du gouvernement.
À moins enfin que la ministre de la Culture, Rachida Dati, veuille attacher son nom à la réforme d’un service public que le Président Macron qualifiait, il y a quelques années, de « honte de la France ». Pourtant nos démocraties ont besoin de services publics stables et forts ; de défenseurs sereins de nos valeurs : la liberté d’expression, l’indépendance des journalistes, la qualité des émissions, dans un monde menacé par les réseaux sociaux, le populisme et l’extrême droite. Dès lors, un grand débat vaudrait mieux qu’une réforme à la sauvette.