Laurence Rossignol : une féministe en guerre contre les ultras

par Valérie Lecasble |  publié le 22/03/2024

Féministe convaincue mais opposée aux sectarismes, la sénatrice dénonce le féminisme radical

Laurence Rossignol à l'occasion de la journée mondiale de la maladie d'Alzheimer, à Mont-de-Marsan - Photo IROZ GAIZKA / AFP

Elle est la voix des femmes au Sénat, celle qui porte inlassablement leur cause. Rayée de la liste de candidature lors des élections de décembre 2023 par les instances socialistes de l’Oise dont elle était pourtant la sénatrice depuis douze ans, elle a échappé à l’éviction grâce à une mobilisation des femmes en sa faveur. 

Jusqu’à contraindre le Parti socialiste à tourner casaque et à la parachuter dans… le Val-de-Marne où elle est élue pour un troisième mandat consécutif, dans la foulée de ses trois années de vice-présidente du Sénat. Laurence Rossignol, 66 ans, a acquis ses lettres de noblesse. Elle est devenue incontournable à gauche avec un grand sens des responsabilités.

Sensible à la cause palestinienne, elle refuse pour autant qu’on l’érige en dogme, au-delà du combat ultime, le sien, celui des femmes qui l’amène à dénoncer les dérives sectaires du nouveau féminisme intersectionnel radical, construit sur la fièvre identitaire. Pas question pour elle, de placer l’appartenance à une ethnie ou à une religion au-delà de la condition féminine. Sa pire adversaire en la matière s’appelle Houria Bouteldja, icône du féminisme décolonial qui préfèrera protéger sa « race » plutôt que de dénoncer un viol s’il est commis au sein de sa communauté.

Cette universaliste dénonce « l’infiltration des collectifs par des militants qui mettent la cause palestinienne au centre du combat féministe et instrumentalise le mouvement », jusqu’à refuser de reconnaître le viol des femmes israéliennes par les combattants du Hamas lors de l’attaque du 7 octobre. Les fautifs sont tout désignés, La France Insoumise et l’extrême gauche qui « ont constitué des groupes activistes dont la mission est d’intervenir en fraction dans les manifestations féministes ».

Familière des manifestations, Laurence Rossignol défile dès le collège contre la loi Debré qui menace les études supérieures des étudiants puis contre le projet Saunier-Seité qui veut introduire, en 1976, la sélection à l’université. Dès lors, sa vie devient celle d’un engagement, permanent, d’abord à La Ligue Communiste Révolutionnaire avant de diriger la branche « Tendance luttes étudiantes action syndicale » lors de la constitution en 1980 de l’UNEF. Son compagnon de route est alors Julien Dray.

Elle adhère au Parti socialiste en 1981, proche de Laurent Fabius dont elle devient la chef de cabinet quand il préside l’Assemblée nationale, puis échoue trois fois à partir de 1997 à être élue députée et se rabat finalement sur le Sénat en 2011.

Sous François Hollande, elle est nommée trois fois au gouvernement, secrétaire d’État puis ministre sur ses sujets de prédilection, la Famille, les Personnes âgées, les enfants et surtout le Droit des femmes.

Laurence Rossignol n’a rien d’une star et reste peu connue du grand public, mais c’est une bosseuse qui connaît ses dossiers, s’exprime avec aisance et peut revendiquer d’avoir toujours été à l’avant-garde des avancées sociales de son époque. Comme dernièrement lorsqu’elle contribue au dernier vote favorable du Sénat, sur l’IVG. 

Valérie Lecasble

Editorialiste politique