Laurent Berger : « Le match n’est pas fini »

par Valérie Lecasble |  publié le 11/05/2023

Le travail sera au cœur de l’action du leader de la CFDT jusqu’à son départ le 21 juin. À l’occasion de la publication de son livre « Du mépris à la colère », il donne quelques clés dans une interview à l’Obs

Laurent BERGER, secrétaire general de la CFDT - Photo Riccardo Milani / Hans Lucas

Si peu après la promulgation de la réforme des retraites, Laurent Berger a, le premier, saisi la main tendue du gouvernement pour revenir à la table des négociations, c’est, dit-il, que « la politique de la chaise vide, c’est le syndicalisme aux mains vides ».

Le leader de la CFDT se dit encore convaincu aujourd’hui que « certaines victoires sont possibles, notamment sur les salaires. Les minima sont en dessous du SMIC dans 151 branches professionnelles sur 171 ». Pour s’adresser aux 70 % de salariés qui ne bénéficient pas en France du télétravail, il propose d’« ouvrir la semaine de 4 jours dans les entreprises ».

Pas question de laisser l’exclusivité des négociations aux partenaires sociaux. Ou que l’État assène seul ses propositions sans écouter celles des syndicats. Il évoque au contraire une intersyndicale soudée qui pourrait être – enfin – écoutée.

« Le gouvernement doit s’engager à discuter vraiment des propositions des organisations syndicales sur des sujets qui touchent la vie au travail… il y aura sinon du ressentiment dans les entreprises, dans les urnes »

Là est selon lui le cœur de la société française et le déclencheur de sa vie politique : « Le RN se nourrit du ressentiment social… C’est pour ça qu’il faut remettre le travail au cœur du débat public ». Ceci, alors qu’« une partie de la gauche, boboïsée… a perdu une partie de sa capacité à parler du vécu des travailleurs »

Voilà un homme qui repart au combat avec conviction après ces derniers mois où les syndicats ont su tenir leur rang avec dignité et succès. Deux forts regrets, outre le 49-3, l’impardonnable faute du couple Macron-Borne d’avoir fermement et systématiquement refusé toute possibilité de contact ou de dialogue avec l’intersyndicale.

« Je ne connais aucun pays européen comparable dans lequel une mobilisation pourrait durer trois mois sans qu’un responsable ne soit reçu par le gouvernement ! C’est impensable en Belgique, en Espagne, en Allemagne ». Ni Juppé, ni Villepin, ni Fillon n’avaient agi de la sorte.

Une conviction : « le match n’est pas totalement fini ». Reste la possibilité d’un vote le 8 juin qui reviendrait sur l’âge légal à 64 ans. Même si Laurent Berger connaît trop bien Emmanuel Macron pour feindre de croire que cela pourrait véritablement changer le cours de l’histoire.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique