Le crime historique du Hamas

par Laurent Joffrin |  publié le 08/10/2023

Les islamistes de Gaza ont perpétré un massacre en croyant faire avancer leur cause, ils ne récolteront que le malheur. Ce qui ne doit pas occulter les fautes de la droite israélienne.

Laurent Joffrin

Incroyable insensibilité de ceux qui mettent sur le même plan agresseurs et agressés, qui qualifient de « résistance » une opération qui a consisté à tuer indistinctement civils et militaires, femmes, hommes et enfants par centaines, à lyncher des Israéliens sans défense en s’acharnant sur des victimes déjà à terre, à diffuser sur les réseaux les images de ces meurtres comme autant de trophées, à revendiquer, comme une série de victoires bruyamment acclamées, l’immolation de civils innocents.

Un acte que nous avons aussitôt et justement qualifié de « terroriste » et qui l’est au plus haut degré. Tous les Français l’ont immédiatement mesuré en apprenant que les tueurs, entre des centaines de cibles, ont attaqué une « rave party » qui se tenait à quelques kilomètres de la frontière de Gaza, assassinant des dizaines de jeunes Israéliens venus candidement faire la fête dans un kibboutz : un Bataclan du Neguev.

La meilleure analogie, c’est celle du 11 septembre

Le gouvernement israélien a été pris par surprise, ses services secrets au premier chef. À cause de cela – et de la date choisie – on compare le massacre perpétré par le Hamas avec la guerre du Kippour de 1973, marquée par une faute comparable. Pourtant la meilleure analogie, c’est celle du 11 septembre : une puissance dominante soudain frappée chez elle, une démocratie blessée au cœur par un acte inédit d’hyperterrorisme, quelque 700 morts à ce jour, soit, en proportion de la population d’Israël (9 millions d’habitants), des pertes humaines supérieures à celles des Twin Towers. Avec cette cruauté supplémentaire : plus de cent otages enlevés par les terroristes et séquestrés à Gaza, dans l’espoir d’en faire des boucliers humains.

Le Hamas islamiste, à qui des militants aveugles et sectaires croient en France trouver une justification, veut venger l’humiliation des Palestiniens, remettre leur cause sur le devant de la scène mondiale : par sa haineuse violence, il ne leur apportera que du malheur. Aucun gouvernement, de droite, de gauche ou du centre, ne peut subir cette épreuve sans préparer une riposte à la mesure de l’attaque. Le gouvernement israélien mérite toutes sortes de critiques – nous n’avons pas manqué de les rappeler – mais il a le droit de se défendre. De nouveaux combats prolongeront ceux de ce week-end. Dissimulé parmi les civils de Gaza, le Hamas attirera sur eux les cruautés de la guerre.

Comment négocier avec une organisation qui proclame sa volonté de détruire Israël ?

La négociation est toujours préférable ? Certes. Mais comment négocier, ici et maintenant, avec une organisation obscurantiste et impitoyable, qui proclame solennellement – dans sa charte fondatrice, toujours en vigueur – sa volonté de détruire l’État d’Israël ? Comment éviter que les actions du Hamas ne confortent les plus extrémistes du spectre politique israélien et ne répandent un peu plus l’idée que toute concession est inutile, que tout scrupule est nuisible, que toute reconnaissance des droits de l’adversaire est vaine ? Un seul espoir : que le gouvernement attaqué, légitime dans sa défense, admette que le cycle infernal de la violence été de la contre-violence doit être contenu, maîtrisé, dans l’intérêt même du peuple israélien. Souvent la retenue du plus fort est la meilleure politique. Après le 11 septembre, le gouvernement américain, au-delà de sa réplique légitime en Afghanistan, avait déclenché la deuxième guerre du Golfe. On connaît la suite…

Ce qui mène à l’inévitable réflexion, au-delà de l’irrépressible émotion devant le massacre. Nous l’avons aussi écrit : un gouvernement qui se faisait fort de garantir en toutes circonstances son hégémonie militaire, de résoudre tout conflit par la force, de protéger sa population en jouant le fait accompli et l’intransigeance permanente, n’a pas évité le retour de l’insécurité et de la guerre.

L’espoir de la paix par le partage des terres reste la seule boussole possible pour ce peuple israélien

Les grands esprits se moquent volontiers de la « solution à deux États » dont l’ONU et nombre de nations se réclament pour chercher une issue au conflit. On le comprend : elle n’a jamais semblé plus éloignée et les crimes du Hamas la rendent encore plus nébuleuse. Mais quid de l’autre solution ? Celle de la force qu’on croit à jamais supérieure, celle de l’implacable mais vaine dissuasion de l’ennemi, c’est-à-dire celle de la guerre sans fin ? On admettra, après ce sanglant week-end, qu’elle n’a pas non plus apporté la sécurité au peuple israélien.

La droite israélienne, alliée à l’extrême-droite, favorise, par sa dureté, la domination des terroristes du Hamas parmi les Palestiniens, facilitant leur recrutement, leur armement et leur manipulation par des puissances hostiles, l’Iran au premier rang. Le compromis à jamais impossible ? La guerre du Kippour, déjà citée, a mené, six ans plus tard, à la conclusion d’un traité de paix avec l’Égypte, jamais violé depuis cinquante ans. L’Histoire nous le rappelle : rien n’empêchera qu’au-delà du sang et des larmes, en dépit des épreuves et des morts, l’espoir de la paix par le partage des terres, serait-il lointain et à peine visible, reste la seule boussole possible pour ce peuple israélien qui aspire, comme les autres, à la sécurité et à la vie.

Laurent Joffrin