Le Liban va-t-il s’embraser ?

par Agnès Levallois |  publié le 28/06/2024

Le dernier raid israélien dévastateur sur un immeuble de Nabatiyeh  au sud du Liban, renforce la peur, sur place, d’un embrasement régional.

Agnès Levalllois

Depuis le déclenchement de la guerre à Gaza et le soutien apporté par le Hezbollah au Hamas, les violences n’ont pas cessé entre Israël et le Liban. Le bilan est lourd côté libanais, puisque près de 500 Libanais ont été tués, dont quelque 312 combattants du mouvement chiite, et côté israélien, avec au moins 15 soldats et 11 civils tués. Sans compter les dizaines de milliers de civils qui ont quitté leurs maisons des deux côtés de la frontière.

Le ministre israélien de la Défense ne cache pas son intention de mener une opération d’envergure pour en finir avec la capacité de nuisance du Hezbollah en établissant une « zone de sécurité » d’une vingtaine de kilomètres, c’est-à-dire jusqu’au fleuve Litani. Jusque-là les États-Unis ont réussi à retenir les Israéliens pour éviter un embrasement régional, le risque étant que les Iraniens, qui soutiennent le Hezbollah, entrent également en guerre. Ni Washington ni Téhéran ne veulent de cette guerre, d’autant qu’ils mènent des négociations à Oman pour tenter d’améliorer les relations bilatérales.

En raison de cette vive tension, nombreuses sont les déclarations appelant à la retenue. Le secrétaire américain à la Défense met en garde contre « les risques d’une nouvelle guerre entre Israël et le Hezbollah, qui pourrait facilement dégénérer en une guerre régionale ». La ministre allemande des Affaires étrangères a fait le déplacement à Beyrouth, tout comme le cardinal Pietro Parolin, secrétaire d’État du Vatican, et Hossam Zaki, le secrétaire général adjoint de la Ligue arabe.

« Les Israéliens entendent-ils profiter d’une fenêtre de tir provoquée par l’élection présidentielle en Iran pour attaquer ? »

Les craintes ont été accentuées par les déclarations de Benyamin Netanyahou selon lesquelles les plans étaient prêts pour une intervention de l’armée, d’autant que la phase intense des combats à Gaza touche à sa fin et que certaines forces pouvaient donc être redéployées vers le nord. Les Israéliens entendent-ils profiter d’une fenêtre de tir provoquée par l’élection présidentielle en Iran pour attaquer ? Cette hypothèse a fait réagir le chef des affaires humanitaires de l’ONU qui a qualifié un tel scénario de « potentiellement apocalyptique ».

Cette recrudescence de la tension intervient alors que le pays est sans président depuis octobre 2022, que le gouvernement expédie les affaires courantes, mais ne dispose n’aucune légitimité et d’aucun poids pour tenter de trouver une solution ou tout au moins de participer aux efforts visant à une issue à la crise.

Face à cette situation, les Libanais sont partagés entre le déni de la réalité et la crainte d’être, encore une fois, pris en otage. Le déni s’explique par la succession de crises que traverse le pays depuis 2019 : crise financière et économique, crise sanitaire, crise politique, explosion du port de Beyrouth… Mais cela ne les empêche pas de garder leur sens de l’humour et de proposer d’envoyer un émissaire à Paris pour aider le président français à trouver une solution à la crise que traverse la France après la dissolution de l’Assemblée nationale !

Agnès Levallois

Editorialiste Etranger - Vice-présidente de l'IREMO