Le Pen : le procès de tous les dangers
Elle risque un million d’euros d’amende, dix années de prison, et surtout dix ans d’inéligibilité. Une peine qui pourrait la disqualifier pour la présidentielle.
Lundi 30 septembre, Marine Le Pen entame l’une des parties les plus risquées de sa carrière. Placée en tête dans les sondages pour la prochaine élection présidentielle, la cheffe du Rassemblement National peut voir sa vie politique basculer avec le procès sur les emplois fictifs des assistants parlementaires qui s’ouvre pour deux mois. Un jour sur deux, cette avocate de formation qui avoue avoir planché tout l’été sur le dossier, devra comparaître, non plus vêtue comme autrefois de sa robe noire, mais sur le banc des accusés, soupçonnée, avec vingt-quatre de ses collègues, d’avoir détourné les fonds alloués par le Parlement européen à ses députés qui rémunèrent leurs collaborateurs, pour en réalité les utiliser pour les campagnes électorales françaises du Rassemblement National.
Comptant 160 pages, « le dossier est fourni et solide. Avec les pièces qui y figurent, je vois mal comment Marine Le Pen peut échapper à une condamnation », est convaincu Patrick Maisonneuve, l’avocat du Parlement européen qui s’est porté partie civile dans l’affaire quand son ancien Président Martin Schulz a déposé plainte pour une période portant sur cinq années, de 2014 à 2019.
Consciente du danger, Marine Le Pen n’a eu de cesse de débusquer les failles du dossier et de trouver des arguments afin d’aider ses avocats à contre-attaquer. Parmi ses proches, on s’inquiète cependant, tant ils connaissent les difficultés éprouvées dans le passé pour financer le Rassemblement National, ce qui rend plausible la tentation d’aller puiser dans les fonds versés par le Parlement européen. Marine Le Pen risque-t-elle pour autant l’inéligibilité ? C’est la question clé à laquelle seuls les juges seront habilités à répondre lorsqu’ils décideront ou non d’assortir d’inéligibilité leur probable condamnation en première instance. Une telle décision ne se prend pas à la légère et devra être assumée devant l’opinion publique.
La situation de Marine Le Pen évoque, par certains côtés, celle de Donald Trump. Rompue au combat, la leader du Rassemblement National pourrait prendre ses électeurs à témoins et contester toute décision judiciaire qui pourrait l’empêcher de concourir à une élection présidentielle où elle est favorite.
Le deuxième sujet est celui du temps judiciaire. Si elle était condamnée, Marine Le Pen ferait évidemment appel. Avec la cassation, la procédure peut durer, comme celui de François Bayrou et de ses collaborateurs, condamnés sur un motif semblable. « Il y a de bonnes chances qu’elle parvienne à franchir le cap de 2027 », prédit notre avocat du Parlement européen. Une fois élue, elle serait protégée par l’immunité présidentielle et plus rien ne pourrait la menacer. Pour plus de précautions, la leader du Rassemblement National pourrait même tenter d’accélérer le tempo acculant Emmanuel Macron à la démission pour provoquer une présidentielle anticipée…