Le Pen-Poutine : la ligne est rétablie

par Laurent Joffrin |  publié le 13/07/2023

Marine Le Pen condamne la livraison de missiles à longue portée à l’Ukraine. Pour la paix ou pour son ami Vladimir ?

Laurent Joffrin

Chassez le naturel… Devant l’évidence de l’agression russe de février 2022, Marine Le Pen avait mis en veilleuse la posture prorusse qui était la sienne depuis des années. Elle avait condamné l’attaque et soutenu – mezzo voce – le soutien apporté à l’Ukraine par l’Union européenne et les États-Unis.

Est-ce la fin de cette tardive lucidité ? Elle vient de juger « irresponsable » la livraison de missiles à longue portée décidée par les alliés occidentaux et notamment par la France.Il faut au contraire, dit la cheffe du RN, qu’Emmanuel Macron propose la tenue d’une conférence de paix destinée à mettre fin au conflit.

Personne ne contestera la dangerosité d’une escalade en Ukraine ni la nécessité de parvenir, un jour ou l’autre, à réunir Russes et Ukrainiens autour d’une table de négociations. Aussi bien, certains armements posent d’angoissantes questions pour les civils (les armes dites « à sous-munitions ») et d’autres ouvrent la possibilité aux Ukrainiens de frapper en profondeur le sol russe (Scalp) ce qui reviendrait à quitter la position défensive de cette nation envahie et à provoquer une extension du conflit.

Mais ces arguments, qui n’ont rien d’aberrant, se heurtent à une double réalité. Pour engager des discussions de paix, il faut être deux. Rien pour l’instant dans l’attitude de Vladimir Poutine ne laisse augurer d’une volonté de compromis. Il est peut-être prêt à discuter, mais sur une base simple : ce qui est à moi est à moi, ce qui est à vous est négociable…

Il apparaît ensuite que le potentiel militaire russe s’est renforcé ; sans armes supplémentaires, l’armée ukrainienne risque de piétiner indéfiniment, sans entamer sérieusement les positions de l’envahisseur.

Dans ces conditions, toute négociation risque fort de ressembler à une reddition de l’Ukraine, qui entérinerait l’amputation d’un cinquième de son territoire. Ce qui pose la question suivante : en dénonçant les livraisons d’armes et en exigeant une négociation, Marine Le Pen cherche-t-elle à favoriser une paix honorable pour se poser en femme d’État raisonnable, ou bien à aider, une nouvelle fois, le dictateur russe ?

Difficile à dire. Mais ses antécédents ne plaident pas pour elle.

Laurent Joffrin