Les professeurs retournent à l’École !

par Jean-Paul de Gaudemar |  publié le 12/04/2024

Nostalgie, quand tu nous tiens. Macron réinvente les Écoles Normales…, celles qui firent des « hussards noirs » les héros de l’École de la Troisième République

Une nouvelle fois sur tous les fronts, volant la vedette à tous ses « collaborateurs », non seulement sa ministre mais aussi son Premier Ministre, le président de la République s’est emparé de la réforme de la formation des maîtres.

En une trentaine d’années seulement, cette dernière aura ainsi changé quatre fois de cadre, passant des écoles normales aux IUFM (Institut Universitaire de Formation des Maîtres) à partir de 1990 et la loi Jospin, puis aux ESPÉ  (École Supérieure du Professorat et de l’Éducation) après la loi Peilhon de refondation pour l’école de 2013, puis aux INSPÉ (Institut National Supérieur du Professorat et de l’Éducation) avec la loi Blanquer de 2019, et enfin les ENSP (École Normale Supérieure du Professorat) à partir de 2025 d’après les récentes déclarations de Macron.

Si l’on analyse la crise que traverse aujourd’hui le monde enseignant, on se heurte à plusieurs questions : celle de l’attractivité d’un métier de moins en moins valorisé socialement et financièrement, celle d’une formation inadaptée à la réalité du métier, celle de la carrière et de la mobilité professionnelle que devrait encourager le métier.

Le parti pris par l’actuel gouvernement pour tenter d’enrayer cette grave crise est de revenir à un concours de recrutement placé en fin de licence, de façon à pouvoir ouvrir au maximum le concours à tous les licenciés de toutes les disciplines mais sans renoncer à la délivrance en fin de formation d’un diplôme de master.

Il est possible que ce dispositif contribue à améliore l’attractivité du métier au sens où les étudiants n’auront plus besoin de s’engager dans un master sans être certains de réussir au concours.  Mais la question peut-être la plus importante reste celle de la qualité de la formation dans les Instituts actuels. Trop de théorie, et pas assez de pratique ?

 « L’universitarisation » de la formation des maîtres depuis 30 ans a en effet eu un côté positif, celui de rehausser le niveau de compétences disciplinaires des candidats mais elle a aussi eu pour conséquence d’affaiblir l’expérience pratique des jeunes maîtres.

En ce sens, au-delà de la référence nostalgique aux écoles normales, ce qui va compter c’est la capacité de cette formation des maîtres renouvelée à retrouver les vertus de l’apprentissage pratique d’alors.

On devine alors que le coût réel d’une telle transformation de la formation des maîtres ne saurait se limiter aux rémunérations des lauréats des concours comme élève-fonctionnaire ou professeur stagiaire. Il exigera aussi la prise en compte des temps partiels qui seront dégagés pour permettre aux écoles normales « supérieures » de se doter de ces enseignants expérimentés capables de transmettre leur expérience auprès des plus jeunes.

Incidemment, cela revient aussi à demander aux universités qu’elles sachent délivrer des formations professionnalisantes vers ce métier très particulier. Mais après tout, si elles savent le faire pour d’autres métiers, ingénieur, médecin, avocat…Il serait paradoxal qu’elles n’y parviennent pas pour un métier qui est le leur !

Jean-Paul de Gaudemar

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