Mac Mahon : que d’urnes, que d’urnes !

par Pierre Feydel |  publié le 21/06/2024

En 1877, le président Mac Mahon monarchiste dissout l’assemblée. La chambre lui revient plus républicaine que jamais. Il doit démissionner…

D.R

 Au milieu des ruines du Second Empire, écrasé par La Prusse, la République a été proclamée le 4 septembre 1870. Mais elle reste fragile. Dans un premier temps, Adolphe Thiers, réussis à contenir les monarchistes. Mais, en mai 1873, le maréchal de Mac Mahon qui rêve de restaurer la couronne est élu président de la République. Il nomme Albert de Broglie chef du gouvernement, partisan de l’« ordre moral ». Lequel fait voter une loi qui porte le mandat présidentiel à 7 ans ? Mais la troisième République prend consistance après les lois constitutionnelles de 1875. Aux élections de 1876, les Républicains l’emportent par 366 sièges sur 533. Le Sénat garde une courte majorité de droite. Jules Simon, républicain et conservateur a pris la tête du gouvernement. Et il entend donner des gages à la gauche, en épurant la haute administration, en laissant les députés abroger une loi contre les délits de presse.

Le maréchal-président s’agace et envoie une lettre d’admonestation au président du Conseil qui démissionne. Et revoilà le duc de Broglie aux affaires. Le lendemain, Léon Gambetta fait voter le refus de la confiance. Le président fait alors ajourner la chambre pour un mois. Les 363 députés républicains signent alors un manifeste dénonçant « la politique de réaction et d’aventure ». Cette fois, le président dissout. Patrice de Mac Mahon aime l’autorité. C’est un soldat qui s’est illustré en Algérie, puis pendant la guerre de Crimée.

Lors de l’assaut de la redoute de Malakoff, il lance un : « j’y suis, j’y reste ! », qui fait sa gloire. Pendant les guerres d’Italie, il se distingue à la bataille de Magenta. Il y gagne son bâton de maréchal et le titre de duc du lieu. La guerre de 70 le révèlera moins brillante. Ensuite, il participe à la répression de la Commune. Réputé mauvais stratège comme militaire, il ne se distingue pas par sa finesse comme président. On lui prête, ce commentaire mémorable aux inondations de 1875 : « que d’eau, que d’eau ! »

En face de lui, Léon Gambetta, l’homme qui a quitté la capitale encerclée par les Prussiens en ballon pour organiser la résistance en province. Brillant avocat, orateur puissant, figure majeure des Républicains, il va mener une campagne sans merci contre le gouvernement dont les préfets multiplient les actes d’intimidation contre l’opposition. À Lille le 15 août, il lance à ses adversaires : « Quand la France aura fait entendre sa voix souveraine, croyez-le bien Messieurs, il faudra se soumettre ou se démettre. »

Les Républicains gagnent les élections. Mac-Mahon tergiverse. Mais les élections sénatoriales elles aussi, donnent la majorité à la gauche. La popularité de Gambetta qui s’est battu en duel avec un député bonapartiste, mais sans victime, est à son comble. Cette fois, Mac Mahon démissionne. Cette fois, la République est bien installée.

Pierre Feydel

Journaliste et chronique Histoire