Macron dissous
Avant de devenir le zombie de l’Élysée, le président doit au moins faire en sorte que les forces républicaines l’emportent sur le RN.
Emmanuel Macron a tendu un piège à ses adversaires : il est tombé dedans. Il a lancé « une grenade dégoupillée » sur la scène politique (ce sont ses termes). Elle lui a explosé à la figure. L’histoire électorale du macronisme ? D’abord la majorité absolue, puis la majorité relative, puis la minorité relative et aujourd’hui, la minorité absolue. Reléguée en troisième position dans la plupart des cas, avec 22 % au niveau national, la macronie passe du statut de groupe central à celui de supplétif d’une autre majorité, à construire.
Bien pire : il devait être le rempart contre le Rassemblement national, il en est devenu le marchepied. Il devait bloquer son ascension, il lui a fait la courte échelle. Sa politique a coïncidé avec un triplement ou presque du score du RN de 2017 à 2024. Sa dissolution précipitée a pris par surprise son propre camp, qui tient ce coup de poker pour un coup de Jarnac dirigé contre elle-même ; force compacte dirigée d’une main de fer, le RN a surmonté sans difficulté l’épreuve des législatives et c’est leur initiateur qui a mis le genou à terre.
Avant de s’effacer – resterait-il à l’Élysée – Emmanuel a un devoir moral : rendre la pareille à tous ceux qui ont voté pour lui sans partager ses idées pour faire barrage au RN. Ce barrage, aujourd’hui ; c’est le désistement symétrique de celui de la gauche, qui retirera ses candidats quand le RN sera menaçante et qui appelle à voter pour tout candidat qui reste républicain, quel que soit son parti. Au lieu de cela, les macronistes envisagent une casuistique où ils choisiraient avec mille précautions ceux des non-RN pour lesquels ils appelleront à voter. Alors que la gauche n’a pratiquement aucune chance d’être majoritaire et que le RN est aux portes du pouvoir.
Hypocrisie centriste qui consiste à mettre sur le même plan des coalitions qui ne sont pas dans la même situation. Mais sans doute est-ce conforme au cynisme de cette ancienne majorité qui régnait grâce à des alliances floues, des politiques mi-chèvre, mi-chou, des votes purement négatifs et se trouve fort démunie quand il s’agit de prendre des positions fondées sur des principes.