Macron, la sécurité et l’immigration : coup d’œil à droite, toute !

par Valérie Lecasble |  publié le 25/05/2023

Sur fond de violences et de sondages favorables à un durcissement sur l’immigration, pour tenter de contrer le RN et de trouver une majorité avec les LR, Emmanuel Macron y va fort

French President Emmanuel Macron- Cérémonie à Roubaix-Photo by Yoan VALAT / POOL / AFP)

Au cours de son premier quinquennat, il n’avait pas osé s’y atteler. La sécurité, l’immigration sont des sujets qu’il connaissait mal. Pas dans son ADN. Pour le régalien, il avait préféré pendant les cinq premières années de sa présidence se concentrer sur les militaires et leur lutte contre le terrorisme.
Il doit à présent se rendre à l’évidence : la menace terroriste s’est éloignée et c’est la menace intérieure au pays qui préoccupe le plus les Français.

Il aura donc fallu six longues années pour qu’il se jette dans l’arène. La mine et le ton sont graves. Ce jeudi 25 mai, à Roubaix, devant les cercueils des trois policiers tués par un chauffard, Emmanuel Macron dénonce « les comportements irresponsables qui tuent ». Avant d’appeler au « respect » de tous les agents publics qui « risquent leur vie » pour protéger les autres.

Le même jour, un sondage Ifop pour le JDD vient confirmer la tendance claire depuis l’appel, quelques jours , du trio de droite Éric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix : les Français sont tellement désireux de faire reculer l’immigration en France qu’ils accepteraient à 69 % de réformer la Constitution afin de pouvoir déroger aux règles de l’Union européenne ! Un Frexit ! Comment en est-on arrivés là ?
Un constat : pour une majorité de Français, l’augmentation des violences est désormais liée à la hausse de l’immigration. L’amalgame est sans appel.

Emmanuel Macron a compris qu’il ne pourrait plus escamoter le débat. La veille, en Conseil des ministres, il a lancé le concept de « décivilisation », une façon à la fois de globaliser la responsabilité de la hausse de la violence en France et de s’en exonérer. Et aussi sans doute de préparer l’opinion, toute l’opinion, à un prochain tour de vis sur l’immigration.

Car pendant ce temps, Gérald Darmanin mène les négociations. Après moult volte-face, le Président de la République lui a demandé, n’en déplaise à Emmanuel Borne, de faire voter à l’Assemblée nationale son projet de loi sur l’immigration. Ce projet comporte deux piliers : un durcissement du contrôle de l’immigration, mais aussi une régularisation dans les métiers sous tension des employés à qui l’on donnerait un titre de séjour, ce dont la droite refuse d’ entendre parler.

Des paroles aux actes, le chemin est tortueux. On suggère à présent que Gérald Darmanin pourrait troquer son projet de régulariser les sans-papiers contre l’abandon par les LR de leur projet de réforme de la Constitution. Malgré ce savant tour de prestidigitateur, les LR auraient tout simplement obtenu… ce qu’ils demandaient initialement. Et que les macronistes de gauche leur refusaient.

Ce serait le prix à payer pour que le ministre de l’Intérieur puisse obtenir – avec les LR – l’impossible majorité dont il rêve. Au risque de faire voler en éclats pour de bon le fameux « en même temps ». Et de perdre l’aile gauche de sa propre majorité.
La question de l’immigration n’a pas fini de tordre le bras au politique.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique