Macron : la tentation impériale
Excellence macronienne, Richard Ferrand propose de permettre au président de rempiler pour un troisième mandat. Ce n’est pas forcément un canular…
Le 18 avril 1804, Jean-François. Curée, obscur membre du Tribunat, sans doute manipulé par Fouché, dépose une motion proposant que Bonaparte, Premier Consul, soit déclaré empereur. On vient de découvrir le complot de Cadoudal, qui a conduit à l’exécution du duc d’Enghien.
Inquiets des conséquences que pourrait avoir pour eux la mort subite du Premier Consul, les proches de Bonaparte souhaite établir à son profit une monarchie impériale, garantie de la pérennité du régime.
L’histoire de la Vème République retiendra peut-être que le Curée d’aujourd’hui, soucieux de prolonger la présidence d’Emmanuel Macron, comme son lointain modèle, le pouvoir de Bonaparte, s’appelle Richard Ferrand.
Moins obscur, mais désormais marginal puisqu’il s’est retiré de la vie politique, l’ancien président de l’Assemblée vient de proposer dans le Figaro qu’on modifie la constitution pour permettre à Emmanuel Macron, souvent comparé à Bonaparte Premier Consul, de se présenter une troisième fois à la présidence de la République.
Ainsi, dans cette monarchie républicaine, le règne du jeune chef d’État pourrait durer quinze ans, soit la longueur de temps qui a vu Bonaparte gouverner la France.
On en voit les avantages pour les affidés du créateur d’En Marche : la garantie de rester sous les ors cinq années de plus ; l’évitement d’une guerre de succession qui menace d’éclater bientôt entre Édouard Philippe, Gérald Darmanin, Bruno Le Maire et quelques autres ; la stabilité d’un pouvoir centriste et impérieux, sinon impérial, qui rassurera les élites françaises, comme celui de Bonaparte avait conforté les élites de l’époque consulaire.
L’initiative de Curée en 1804 rencontrait les vœux du premier intéressé, qui voulait créer une dynastie dans sa famille. On ne sait si la proposition de Ferrand a reçu l’onction de son maître. Mais ce président, qui aura tout juste 50 ans en 2027, peut vraisemblablement considérer qu’il est parfaitement capable de rester à l’Élysée pour un bail supplémentaire après cette date.
Ou, en tout cas, que son maintien à la présidence épargnerait à la macronie l’éclatement que chacun lui prédit avec l’effacement de son fondateur.
Pour l’instant, l’initiative reste isolée et un peu baroque. Il faudrait réunir sur elle une forte majorité, sans laquelle il est impossible de réviser la constitution. Il faudrait aussi que les Français soient plus ou moins d’accord. On en est loin. Mais enfin… L’hubris du pouvoir conduit souvent les puissants à des ambitions démesurées.
Après tout, le Général de Gaulle est resté onze ans à l’Élysée, François Mitterrand, quatorze ans et Jacques Chirac douze. Emmanuel Macron se verrait sans doute bien battre le record et égaler Napoléon en durée. À cette nuance près : au bout de quinze ans, l’épopée impériale a pris fin à Waterloo. Angoissant précédent…