Macron : l’électricité, c’est moi !

par Gilles Bridier |  publié le 26/09/2023

Le chef de l’État veut reprendre le contrôle du mécanisme européen des prix de l’électricité sur lequel la France et l’Allemagne s’écharpent

Le président Emmanuel Macron accueille le chancelier allemand Olaf Scholz au palais de l'Élysée à Paris, France, le 12 juin 2023 - Photo Mustafa Yalcin / Anadolu Agency

Pour Emmanuel Macron, la planification écologique qui passe par une réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2030 par rapport à 1990, implique de reprendre « le contrôle du prix de notre électricité ». L’objectif consiste à favoriser la bascule sur une forme d’énergie qui réduise la dépendance des ménages et des industriels aux hydrocarbures.

Mais le mécanisme européen de fixation des prix de l’énergie limite les marges de manœuvre nationales, et le chef de l’État n’a pas à ce stade révélé comment le bras de fer qui s’est établi entre la France et l’Allemagne sur ce dossier pourrait être surmonté.

Les prix de l’électricité sont dépendants du gaz

Aujourd’hui, les règles européennes de fixation des prix de l’énergie obligent à aligner les tarifs de l’électricité sur ceux du gaz, ce qui empêche les Français de profiter de la « rente nucléaire » lorsque les prix du gaz augmentent, comme actuellement. Ces règles, introduites avec la création en 2007 du marché européen de l’électricité, sont considérées comme « obsolètes » par le ministre de l’Économie Bruno Le Maire.

Le carcan n’est pas total : l’an dernier, les ménages français ont payé leur électricité 22 % moins cher que la moyenne européenne, et les entreprises 35 % de moins. Mais le gouvernement français considère que les tarifs pourraient être encore mieux maîtrisés s’ils étaient déconnectés de ceux du gaz.

Pas si simple ! L’Allemagne, qui se trouve déjà dans la situation inverse avec des prix de l’électricité supérieurs d’environ 50 % à ceux de la France, n’accepte pas d’accéder au souhait français, qui pourrait faire perdre de la compétitivité à son industrie en ouvrant la porte à de nouvelles subventions au nucléaire… notamment pour moderniser le parc de centrales existant.

Ce que Berlin, qui a tourné le dos au nucléaire, exclut totalement. Toutefois, une fenêtre semble pouvoir être ouverte avec la proposition de la Commission européenne d’autoriser les subventions à la construction de futures installations de production d’électricité, mais pas plus.

Une réforme nécessaire

Pourtant, la crise ukrainienne et la fin de l’approvisionnement de l’UE en gaz russe rendent inéluctable une réforme du marché de l’électricité, produite en grande partie en Allemagne à partir de gaz russe. Mais les enjeux, qui ont aussi une dimension géopolitique et industrielle, vont au-delà de la seule transition écologique. Ce qui attise singulièrement les tensions entre Paris et Berlin.

Pour l’heure, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a juste confirmé que le bouclier tarifaire serait maintenu jusqu’au début 2025, et qu’il n’y aurait pas en 2024 d’augmentation des tarifs entre 10 et 20 % comme le préconisait la Commission de régulation de l’énergie. Mais tout ceci ne correspond pas encore à une reprise du contrôle des prix de l’électricité comme le projette le chef de l’État, un enjeu majeur dans la perspective de la relance du nucléaire. La solution sera présentée courant octobre, a indiqué Emmanuel Macron.

Gilles Bridier