Macron s’en irait bien-t-en guerre…
L’Allemagne est en transe, Londres bronche, Madrid s’indigne, Rome est en colère, les USA enragent, l’OTAN se braque…Macron est bien seul !
Seul et en même temps… seul. La déclaration de Macron, envisageant, « en dynamique », la présence de troupes françaises sur le sol ukrainien, a sans doute été plus éruptive que disruptive. Elle a choqué une opinion française prise de court. Elle a estomaqué des participants à la Conférence de soutien à l’Ukraine qui n’y ont pas reconnu les termes des débats menés en son sein à ce sujet. Elle a inquiété un monde aux aguets de tout symptôme de « l’escalade » redoutée.
L’intempérant a d’autant plus désarçonné qu’il s’était, depuis février 2022, montré plutôt amène à l’égard de Poutine, saisi d’une ferveur médiatrice que son appel du 4 juin 2022 à ne pas « humilier la Russie » avait illustrée de façon éclatante.
Voilà Paris et son président isolés tout à trac pour la raison inverse : chacun a cru voir lundi se dire une surprenante volonté belliqueuse, acmé d’une séquence de quelques semaines au cours desquelles Macron et Poutine se sont ostensiblement « cherchés »…
En France, poutinistes objectifs et pacifistes d’instinct ont poussé les cris d’orfraie attendus. Peu sont ceux, hors d’un camp macronien dont la gêne était perceptible, qui se sont portés au secours fiévreux d’une déclaration dont ministres et parlementaires se sont évertués à délivrer une version euphémistique, évoquant formation ou déminage (c’était le cas de le dire…) et repoussant toute conclusion à l’envoi d’unités de combat. C’est peut-être le président du Sénat Gérard Larcher qui a le mieux résumé l’opinion générale, en soulignant la gravité constitutionnelle d’une déclaration qui engage le pays sans consultation démocratique préalable.
En Europe, Macron n’a rencontré que des contradicteurs, Pologne de Duda et Suède de Kristersson en tête, qui semblent peu goûter son équilibrisme géopolitique. Que Fico le Slovaque soit furieux peut s’entendre, mais que les pays les plus hostiles à l’expansionnisme russe déplorent l’hystérie virile de Paris édifie bien davantage. L’Allemagne est en transe, Londres, présente à Paris, bronche, Madrid s’indigne, Rome, offensée par l’absence du président au G7 de Kiev du 24 février qu’elle présidait, ne tait pas sa colère. Les USA, au moment où Biden doit rassurer pour obtenir du Congrès les fonds de soutien à l’Ukraine, démentent et enragent, l’OTAN, contrainte de s’avancer pour nier, le fait avec une rudesse qui en dit long.
Quant à la presse du « Sud global », elle ne manque pas d’évoquer une France nostalgique de ses ors impérialistes.
Kiev a distraitement salué, la tête tournée vers Washington et la mise en place -discutée à Paris- de procédures autorisant la livraison par l’UE du million de munitions qu’elle attend pour mars et dont elle n’a reçu que le tiers.
Et Moscou ? Que ce soit par le biais de son ambassade à Paris, de Peskov, de Lavrov ou de ses sicaires télévisuels, elle a fait les gros yeux en bichant ostensiblement : au sortir d’une réunion qui devait réaffirmer l’unité du camp occidental, elle le voit se déchirer, discréditant la parole du plus insolent de ses contempteurs actuels, même si ce n’est ni le plus constant ni le plus sage….