Maisons (avec piscine) à vendre… en Cisjordanie
Des agents immobiliers cherchent à vendre des logements neufs à de nouveaux colons religieux ou étrangers
Pour imposer sa domination sur les territoires occupés, rien ne fait reculer Benyamin Netanyahu. Alors que dans la bande de Gaza, l’armée menace la ville de Rafah, plus à l’Est, en Cisjordanie, les colons sont de plus en plus nombreux à s’implanter, sous l’impulsion en particulier du ministre israélien des Finances Bezalel Smotrich. Cette figure de l’extrême-droite a annoncé le 22 mars la saisie de 800 hectares supplémentaires de terrain dans la vallée du Jourdain, après les 300 hectares qu’il avait réquisitionnés le 29 février.
Ainsi, progresse l’occupation de la Cisjordanie où 800 000 colons étendent chaque jour leur présence dans ce territoire délimité en 1967 après la Guerre des Six jours, où devait naître un jour un futur État palestinien.
Dans la foulée, un programme de construction de 3 476 logements neufs, soutenu par le même ministre, viendra compléter cette année celui de 14 600 nouveaux logements déjà édifiés en 2023 dans la zone occupée selon l’ONU, un record. Des agents immobiliers habilités font la promotion de ces belles maisons de 7 pièces avec piscine qui seront disponibles dans moins de trois ans. Ceci, au mépris du droit international, qui interdit d’annexer par la force tout territoire qui se situe au-delà de la ligne verte établie en 1949 pour délimiter la frontière israélienne. Sur le papier, toute vente de terrains y est illégale puisqu’ils n’appartiennent à personne.
Vue sur la vallée
Cela n’empêche pas ces agents immobiliers sans scrupules de proposer, sur leur compte Instagram et lors de foires immobilières, d’investir dans des projets prometteurs : un appartement de cinq pièces et 180m2 avec trois salles de bains et une belle vue à Ma’ale Adumim ; un cottage de six chambres et 193m2 à Efrat ; ou encore 5 chambres et 128m2, avec balcon et vue sur la vallée, au sein d’un immeuble de cinq étages et dix appartements à Neve Daniel…
On peinerait à y croire si ces annonces ne figuraient pas sur leurs sites et si Oona Barret, une journaliste d’investigation reconnue du quotidien francophone indépendant Pivot, au Québec, n’avait infiltré puis interrogé ces promoteurs, en participant il y a quelques semaines, dans une synagogue à Montréal, à une foire immobilière destinée à la vente de ces biens. Dans un documentaire réalisé et diffusé par le media d’investigation français Blast, elle explique d’ailleurs par le menu la façon dont se déroulent ces ventes.
Dernière offre…Gaza en ruines
Une question demeure : pourquoi acheter un bien situé en Cisjordanie, une zone où l’on risque sa vie à chaque instant ? Pour certains – religieux, juifs orthodoxes, fervents soutiens de la politique de Benyamin Netanyahu -, c’est une façon militante de participer à la colonisation du territoire dans l’objectif de remplacer progressivement la population palestinienne. D’autres, surtout en Amérique du Nord, sont tout simplement à la recherche de bonnes affaires, prêts à y habiter malgré les contraintes de sécurité, pour peu que cela leur coûte moins cher qu’ailleurs, les colons étant exonérés de taxe et bénéficiant de réductions fiscales.
Projet militaire, colonial ou d’entreprise privée, les trois motivations sont liées, encouragées par l’extrême-droite israélienne. On a même vu des promoteurs proposer des projets dans la bande de Gaza en ruines, comme s’il était déjà temps de prévoir sa reconstruction. Du cynisme à l’état pur.