Manuel Bompard : un insoumis aux ordres
LFI est une famille dont Jean-Luc Mélenchon est le patriarche secondé par Manuel Bompard, son fidèle lieutenant. Musclé. Portrait
Surprenante d’agressivité la réaction de Manuel Bompard à l’interdiction de l’abaya à l’école! Une décision qu’il qualifie de « dangereuse et cruelle », « contraire à la constitution », arguant -faussement – qu’on a «beaucoup de mal à distinguer ce qui est une abaya, d’une robe longue » et n’hésitant pas à déposer « un recours devant le Conseil d’État ». Rien moins ! les frères musulmans apprécieront…
En réalité, l’homme exprime moins sa pensée que celle de Jean-Luc Mélenchon. Comme il épouse parfaitement toutes ses évolutions , du socialisme républicain en passant par la défense passionnée de l’abaya.
Lui aussi avance à marche forcée au sein du parti. Ce soir-là, dans une salle mal éclairée, mais bourrée de fidèles, il sera élu « coordinateur du parti », à l’applaudimètre, face à une « opposition » étonnamment silencieuse. Pas de démocratie, pas de vote, mais une affirmation qui vaut toutes les explications : « le vote n’est pas forcément l’alpha et l’oméga de la démocratie. L’objectif, c’est d’être le plus efficace possible. »
Ainsi parle l’un des plus fidèles de Jean-Luc Mélenchon. Décrit comme « loyal, fidèle, dévoué », le néo-député marseillais est uni par un attachement sincère et filial à son modèle. Amitié réciproque. Dans le cœur du patron, Bompard a même réussi à devancer Panot et Quatennens.
Pourtant engagé au départ au PS, il cède à la gauche protestataire dès ses dix-neuf ans lorsqu’il s’oppose au CPE et s’engage en faveur du « non » au référendum de 2005. Un déclic : « le PS avait renoncé à son objectif de transformation de la société, tandis que la gauche radicale, avec laquelle j’étais plus à l’aise sur le fond, était dans une dimension protestataire et ne se posait pas la question de l’exercice du pouvoir. »
Il retrouve la foi en la figure de Jean-Luc Mélenchon, lui aussi en rupture de ban avec ses anciens camarades socialistes. De là est née une complicité jamais démentie. Dixit Jean-Luc Mélenchon : « Il a la tête bien faite celui-là, il comprend tout mieux et plus vite que les autres. Chaque fois que j’ai un doute, je me retourne pour voir s’il est derrière moi. »
Bompard, en bon militant marxiste, a dévoré toute la littérature politique, convaincu qu’il faut maîtriser les concepts pour s’imposer. Il a gravi petit à petit tous les échelons dans l’entourage du chef en devenant secrétaire général du Parti de gauche en 2010 et directeur des campagnes présidentielles de 2017 et de 2022.
Ingénieur de formation, mathématicien méthodique, organisé et rationnel et froid, il n’hésite pourtant pas à jouer les gros bras dès lors que l’on s’oppose à Jean-Luc. Pas touche ! Il n’a pas hésité à faire le ménage sur le Front de gauche en virant des militants rebelles durant les régionales 2015 dans le Sud-Ouest. En 2019, il est suspecté d’avoir é »carté les cadres LFI de la liste des européennes menée par Manon Aubry. Et à l’automne 2022, c’est encore lui qui attaque frontalement le trop libre François Ruffin, accusé de trahison pour avoir critiqué la stratégie du patron.
Toujours, pour l’instant, dans l’ombre du chef charismatique, Manuel Bompard est de tous les combats. En attendant d’être celui qui se profilera à l’horizon présidentiel de 2027. D’ici là, gare à ceux qui se mettent sur la route de Jean-Luc. Et de la sienne.