Marine et Jordan: un couple à la conquête du pouvoir

par Valérie Lecasble |  publié le 17/09/2023

À l’université d’été du Rassemblement National, Marine Le Pen et Jordan Bardella ont affiché leur complémentarité. À elle la vision, à lui l’exécution. Qui va pouvoir stopper leur machine infernale ?

Le président par intérim du Rassemblement national (RN) et député européen Jordan Bardella (à gauche) et la présidente du groupe parlementaire Marine Le Pen (à droite) après une réunion avec Elisabeth Borne à l'hôtel Matignon à Paris- Photo JULIEN DE ROSA / AFP

Elle drague les classes populaires, il séduit les élites. Elle parle pouvoir d’achat, salaires, difficultés à boucler les fins de mois, il surfe sur l’immigration, la sécurité, l’identité. Elle convoque l’inflation alimentaire, il fustige les émeutes urbaines. Elle drague les oubliés de l’ancienne gauche, celle des luttes sociales, il fait de l’œil aux notables de la France de droite « qui va bien ». À eux deux, ils espèrent former un « ticket » pour la prochaine élection présidentielle et conquérir le poste suprême.

Sur le papier, tout paraît minutieusement réglé. Marine Le Pen continue de creuser son sillon pour remporter la présidentielle de 2027. Elle fait la course en tête créditée de 30 à 33 % des intentions de vote dans le dernier sondage – Toluna Harris Interactive pour Challenges – où elle surpasse tous ses concurrents, y compris le meilleur d’entre eux, l’ancien Premier ministre Edouard Philippe.

Jordan Bardella, en bon élève prometteur, préside le Rassemblement National dont il prend la tête de liste pour les prochaines élections européennes avec l’objectif de réitérer sa victoire d’il y a cinq ans.

En ligne de mire, l’élargissement de l’électorat de Marine Le Pen, quitte à aller chasser sur les terres de Marion Maréchal et d’Éric Zemmour.

La dynamique doit mettre en orbite le Rassemblement National pour 2027 quand Marine Le Pen accèderait à l’Élysée et Jordan Bardella à Matignon. Le match serait déjà terminé ?

C’est oublier qu’en politique, rien ne se passe jamais comme prévu.  D’ailleurs, depuis 2022, ce scénario a un air de déjà-vu. Il intègre certes la montée en puissance de Marine Le Pen et de Jordan Bardella au fur et à mesure de la pénétration de leurs idées nauséabondes dans l’opinion. Il valide la stratégie d’une normalisation jusqu’ici réussie.

Mais il omet d’ajouter tous les aléas de la vie politique. Comme celui, magistral, que vient d’effectuer Marine Le Pen.

Samedi 16 septembre à Beaucaire, une ville du Gard dirigée par le RN, Marine Le Pen montre son vrai visage, celle d’une populiste anti-européenne de droite radicale. En fustigeant l’appel à l’aide de Giorgia Meloni à l’Europe pour résoudre l’afflux de migrants à Lampedusa, la patronne du Rassemblement National… sort des clous.  

Le lendemain, à Pontida près de Bergame, elle confirme son tropisme anti-européen en soutenant ostensiblement son ami, patron de la Ligue d’extrême-droite Matteo Salvini, ennemi juré de la Première ministre italienne Giorgia Meloni. La carte postale se déchire…

Quant à Jordan Bardella, 28 ans, qui va publier son livre autobiographique, rien ne dit qu’il restera sagement, jusqu’au bout, dans le sillage de Marine Le Pen, au cas où elle manquerait d’étoffe dans la course à 2027. Il aura alors à peine 32 ans. Trop tendre pour revendiquer la Présidence de la République ? L’ambition n’attend pas le nombre des années.

Gabriel Attal, le ministre de l’Éducation nationale et poulain de la Macronie, aujourd’hui 34 ans, n’en aura pas beaucoup plus.

En 2017, Emmanuel Macron avait seulement 39 ans.

En 2027, les jeunes loups rêvent d’entrer dans la ville.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique