Marlène Schiappa : la décadence sans grandeur

par Valérie Lecasble |  publié le 07/07/2023

Fonds Marianne. « Manque de rigueur », « opacité », « désinvolture »… la commission du Sénat accable Marlène Schiappa, qui n’est plus qu’une ministre indigne en sursis

Marlene Schiappa -PhotoERIC PIERMONT / AFP

Un fiasco ! C’est en ces termes peu amènes que la commission du Sénat a rendu son verdict. Depuis deux mois, ils enquêtaient sur l’attribution des subventions de 2,5 millions d’euros du Fonds Marianne, destiné, à lutter contre les discours séparatistes.


Rappelez-vous : un enseignant décapité par un islamiste, la France s’était horrifiée. Émue, elle avait donné. Le Fonds était destiné à lutter contre la plaie du séparatisme. La cause était noble.

Pas ses acteurs.
D’après les sénateurs, par la voix de leur porte-parole, le Républicain Jean-François Husson, rien n’aurait été fait dans les règles. Marlène Schiappa et son cabinet n’en auraient fait qu’à leur tête, se rendant coupables tout à la fois de « manque de rigueur », d’« opacité » et de « désinvolture ».

La preuve ? L’absence de toute personnalité qualifiée aux côtés du cabinet pour juger de la qualité des projets proposés ou encore le manque de temps et de recul consacrés à leur examen. Autant d’éléments qui ont donné un « sentiment d’amateurisme » dans un processus de sélection des dossiers « bâclé », « opaque » et « fragmenté ».

Non seulement Marlène Schiappa n’a pas su tenir sa promesse politique d’un contre-discours à l’islam radical – ce qui relève de sa responsabilité personnelle – mais, assènent les sénateurs, elle a conçu le Fonds Marianne « comme une grande opération de communication ». Décidément, sa spécialité.

On sait Marlène Schiappa coutumière du fait, depuis le petit tour chez Hanouna, la Une de Playboy enroulée dans un drapeau français jusqu’aux photos dans Paris-Match aux côtés de son nouveau compagnon, elle a tout osé. Mais cette fois, ses audaces, qui amusaient Emmanuel Macron, ne font plus rire personne.

On parle ici d’un prof assassiné de façon horrible, d’une opinion choquée, de la violence et de l’horreur. On parle ici d’une ministre de la République, Secrétaire d’État chargée de l’Économie sociale et solidaire, accusée de « détournement de fonds publics par négligence, abus de confiance et prise illégale d’intérêt ».

Pour justifier du versement des subventions, elle a tenté de charger les lampistes : son cabinet, l’administration, un préfet. Médiocre défense. Mais les sénateurs l’ont désignée personnellement responsable.

Depuis le 4 mai, à la suite du rapport de l’Inspection générale de l’administration (IGA), un juge d’instruction a été désigné pour mener l’enquête sous la houlette du Parquet National Financier. Des perquisitions ont eu lieu. Et les sénateurs vont transmettre leur travail à la Justice.


Dans cette sombre affaire, il reste à clarifier les liens obscurs entre le cabinet de la Secrétaire d’État et Mohamed Sifaoui. L’association de l’ancien journaliste, qui co-dirigeait l’Union des sociétés d’éducation physique et de préparation militaire (USEPPM), a récolté 355 000 euros dont 120 000 euros lui ont été personnellement versés.
Lui aussi a été entendu devant la commission d’enquête où il s’est montré sûr de lui et arrogant, expliquant aux sénateurs comment ils devaient s’adresser à lui…

« Le politique a outrepassé son rôle », dénoncent les sénateurs qui s’interrogent également sur la raison pour laquelle Marlène Schiappa était elle-même intervenue, fin mai 2021, pour supprimer une subvention de 100 000 euros à SOS Racisme, sans aucun argument valable. « Sur ce point au moins, la ministre ne dit pas la vérité », martèle Jean-François Husson.

Légère et inconséquente, Marlène Schiappa a joué, pour mieux briller, avec la douleur des proches et l’argent des victimes. La Playgirl risque de faire encore surement la Une, mais pas celle de Playboy.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique