Mélenchon : La France soumise
La France insoumise appelle à la négociation avec Poutine. Mais dans la situation actuelle, cette négociation aboutirait soit à un échec, soit à la reddition de l’Ukraine et de l’Union européenne.
Non à « l’Europe de la guerre ». C’est avec ce slogan tout en nuances que Jean-Luc Mélenchon a lancé ce week-end la campagne de LFI pour les élections européennes. L’Europe, c’est la guerre, donc. Jadis, Napoléon III disait « l’Empire, c’est la paix ». Les deux formules sont tout aussi fausses : l’Empereur a mené quatre guerres, dont celle qui a précipité sa chute ; depuis sa fondation, l’Europe a maintenu la paix entre des nations qui passaient jusque-là leur temps à se combattre.
Quant à la guerre – faut-il le rappeler ? –, elle a été déclenchée par Vladimir Poutine et non par l’Union européenne, qui a seulement refusé d’abandonner l’Ukraine aux appétit russes. Dans une falsification historique honteuse, Mélenchon renvoie dos-à-dos l’agresseur et ceux qui soutiennent l’agressé. La politique qu’il propose est fondée sur un mensonge.
Double objectif
La France insoumise veut nationaliser le scrutin pour en faire le test de l’impopularité macronienne et la base de départ de son ambition présidentielle. Il faut bien saisir ce que signifie ce double objectif. Mélenchon serait aujourd’hui au pouvoir que la France aurait rompu la solidarité européenne face à la Russie, refusé de livrer des armes à l’Ukraine et proposé une négociation immédiate avec Poutine. Toutes les guerres se terminent par une négociation, dit-il. Certes. Encore que certaines se terminent par une reddition, ce qui est différent.
Car au fond, c’est bien la reddition ukrainienne que propose en fait Mélenchon. Si les discussions s’ouvraient maintenant, comme il le réclame, elles auraient pour base, par définition, la situation sur le terrain. Pourquoi Poutine abandonnerait-il aujourd’hui des territoires conquis au prix de lourdes pertes ? L’Ukraine devrait donc faire une croix sur le quart de son territoire national et offrir cette récompense à l’agresseur. Ensuite seulement, on pourrait discuter de « garanties mutuelles ». À supposer d’ailleurs que le dictateur, conforté par sa réélection, veuille ouvrir des négociations de paix, ce dont il ne donne pas le moindre signe. Quant aux conséquences de sa victoire, elles sont connues d’avance : une volonté décuplée de reconstituer l’ancien empire russe et donc une Europe de l’est encore plus dangereuse.
Mélenchon veut jouer sur l’inquiétude de l’opinion face à la guerre d’Ukraine pour refaire le retard de sa liste sur Raphaël Glucksmann. Pour gagner les voix qui lui manquent, il est prêt à abandonner la démocratie ukrainienne au profit de la tyrannie russe. Il mène en fait la liste de la France soumise à Poutine. Voilà qui est digne du bateleur démagogique que l’on connaît. Et non d’un homme d’État.