Meloni en guerre ouverte contre l’avortement

par Marcelle Padovani |  publié le 21/06/2024

La PM italienne combat ouvertement l’IVG. Malgré quelques grosses boulettes et une opposition inattendue qui pourraient transformer ce sujet si sensible… en vrai boulet

Le Premier ministre italien Giorgia Meloni à Bruxelles au sommet du Conseil européen. Parmi les principaux sujets abordés, la crise migratoire - Photo Nicolas Economou/NurPhoto

En mettant le droit à l’avortement à l’index la semaine dernière au G7, la Première ministre italienne Giorgia Meloni a d’abord voulu illustrer son principal slogan identitaire : « Je suis une femme, je suis une mère et je suis une chrétienne ». Elle a donc signifié sans retenue son hostilité à l’interruption volontaire de grossesse et son soutien au droit sacré à la vie de l’embryon. Elle a aussi affirmé qu’elle ne souhaitait pas appuyer non plus les droits des LGBTQIA+, allant jusqu’à blaguer devant les télés sur sa fatigue d’être interrogée sur « les homo, les bi, les trans, l’avortement et toute la compagnie »…

Audacieuse, la Meloni ? Plébiscitée avec 29 % de suffrages aux Européennes, soucieuse d’exploiter au niveau international ses bons résultats et d’imposer son langage de droitière souverainiste rigide, elle a aussitôt provoqué des réactions hostiles. D’abord de la part des États-Unis et du Canada, favorables, eux, à la défense explicite des droits acquis, y compris le droit à l’avortement, dans la déclaration finale du Sommet des 7. Puis celle particulièrement agressive d’Emmanuel Macron, qui lui a fait la tête pendant deux jours. Enfin, des partis italiens de gauche et des associations féministes, qui se sont retrouvés le 18 juin sur la piazza Santi Apostoli à Rome, pour proclamer ensemble leur hostilité au gouvernement Meloni. Une première grande manif unitaire, du style Front populaire, face à « la première femme Premier ministre qui oublie les droits des femmes », une cheffe de l’exécutif qui, interrogée sur le droit à l’avortement, s’est contentée d’un vague « nous réaffirmons notre engagement à atteindre l’égalité des genres et l’émancipation des femmes et des filles dans toute leur diversité ».

Rétrograde

Les manifestants ont rappelé ses antécédents fâcheux. D’abord, la nomination comme ministre des Opportunités d’une catho traditionnaliste rétrograde, Eugenia Roccella, devenue la cible numéro un des « femmes libres », qui essaient parfois de lui barrer l’accès au ministère. Puis l’introduction d’une norme dans les planning familiaux, dorénavant munis de par la loi de représentants « Pro life » mobilisés pour déconseiller l’avortement. On est arrivé au point qu’entre patrouilles de Pro Life et armée de médecins objecteurs de conscience, il existe aujourd’hui des centres de santé à Rome où l’on ne peut programmer un avortement qu’un jour par semaine.

Mais la plus grosse « tuile » qui vient de tomber sur la tête de Meloni a un nom inoubliable. Alessandra Mussolini, 61 ans, petite-fille du Duce, a décidé lundi dernier de vider son sac. D’abord pour se plaindre d’« entendre sur l’avortement des choses indécentes ». Puis pour déplorer que l’« on pousse des femmes qui ont décidé d’avorter à revenir sur leur décision » sous la pression de militants Pro life « qui plaident pour la natalité » dans les cliniques de planning familial. Et si l’avortement, finalement, n’était que le début du calvaire mélonien ?

Marcelle Padovani

Correspondante à Rome