Michèle Cotta: la confidente de la République

par Yoann Taieb |  publié le 18/11/2023

La journaliste a vécu au plus près les soubresauts de la Cinquième république, entre anecdotes et personnages de roman racontée par Michèle Cotta 

D.R - Editions Bouquins

Sa voix est reconnaissable entre mille et son nom connu de tout le monde politique. Fille du premier maire de Nice après la Libération, elle a été élevée au rythme de l’actualité. Journaliste de talent dans les grands médias de l’époque – L’Express, Combat, RTL, TF1, France 2 -, Michèle Cotta a fréquenté tous les personnages politiques des dernières décennies. À l’époque où les journalistes étaient au plus proche des politiques. Sans filtre.

Le livre ouvre l’épisode majeur, de la chute de la IVè république. Elle a 20 ans. Mandatée par son professeur, elle arrive à l’Assemblée le soir où les militaires en Algérie décident de se rebeller. Premier choc. L’impuissance des députés face à l’événement, la peur dans leurs yeux.  Tout un monde composé d’hommes éminents – Mendès France, Mollet, Faure ou Gaillard –  est balayé par la tornade de Gaulle. Ambiance de fin de règne. Cotta voit les Français siffler le Général et comprend que le lien est rompu entre eux, ce qui se confirme en avril de la même année après l’échec du référendum.

Elle dépeint ses successeurs comme des « personnages de roman ». Pompidou ? Un être bien plus complexe qu’on ne l’imaginait et, surtout, doté d’une grande culture. Giscard ? Un président qui se sait programmé pour les plus hautes fonctions, mais affaibli par la vanité. Mitterrand ? « Un acharné, un esthète » aux manières florentines, mais viscéralement attiré par le pouvoir. Incontestablement, le président dont elle était le plus proche.

Dès le 9 septembre 1965, pour la première élection présidentielle au suffrage universel, il lui confie un scoop retentissant : « Je vais me déclarer candidat contre De Gaulle ». Dès lors, elle ne cessera d’entretenir un lien étroit avec le « sphinx ». En 1978, il éclate de rage, devant elle, en accusant les communistes d’être « des incompétents qui envisagent de nationaliser une entreprise avec seulement 23 ouvriers à Clermont-Ferrand, et pas Michelin». En 1981, il la fait monter à bord de la voiture qui le mène vers le Panthéon pour une scène historique.

Ce livre de 482 pages se lit vite. Si la partie concernant De Gaulle et Pompidou est plutôt convenue, l’analyse de la période Giscard est plus intéressante, quand Michèle Cotta explique en quoi l’esprit de la modernité a réellement imprégné la France. Incontestablement, la partie concernant les années 1980 est la plus prenante, puisqu’elle nous fait découvrir le président socialiste sous des aspects méconnus. Le tome 2 devrait sortir courant 2024. Le thème ? L’auteure et « sa Cinquième ». La passion d’une vie.

Ma Cinquième, par Michèle Cotta, éditions Bouquins, 432 pages, 23 euros.

Yoann Taieb