No pasaran!
Contre toute attente, ils ne sont pas passés. La gauche se retrouve au premier rang d’une assemblée sans majorité claire. La République l’a emporté.
C’est le Waterloo des commentateurs, la Bérézina des prophètes, le désastre des prévisionnistes. Qui l’eût dit ? Selon les estimations convergentes des instituts, la gauche se retrouve en tête de ces législatives, avec le premier groupe parlementaire dans la future assemblée. Cette gauche qu’on disait convalescente, déchirée, reléguée, envoie à l’Assemblée le plus fort contingent de députés, devant les rescapés du macronisme et, surtout, nettement devant les élus Rassemblement national.
Spectaculaire renversement de situation, qui s’explique par l’insigne succès de cette tactique que les mêmes sachants fatigués pensaient usée, dévaluée, obsolète : le Front républicain. Les reports de voix ont été mortels pour les candidats de l’intolérance : même s’ils étaient en tête au premier tour, la discipline républicaine leur a fait mordre la poussière au second. Comme si les électeurs français, soudain pris d’un vertige devant le piétinement des valeurs de la démocratie, avaient adopté un mot d’ordre espagnol : no pasaran!
Un coup de théâtre qui s’explique aussi par la fausseté de ce mantra que les complices de la xénophobie répétaient à l’envi : le Rassemblement national est désormais un parti comme les autres. Bernique ! Le RN fait toujours peur, il inquiète les citoyens, ses propositions sont dangereuses, ses candidats sont une fois sur trois des fascistes, des farceurs ou des cinglés. La gauche a voté républicain comme un seul homme, ou une seule femme.
Plus inattendu : les macronistes égarés par un président tombé à droite, se sont repris et systématiquement préféré la gauche à l’extrême-droite. Ainsi le parti de la discrimination se retrouve troisième au lieu de caracoler en tête. Que dire, avec une émotion certaine, sinon que la République en danger s’est reprise, et qu’elle a gagné !