Non, je ne place pas le RN et Nouveau Front Populaire sur le même plan !
Laurent Joffrin avait exprimé un désaccord avec Bernard Cazeneuve sur l’attitude à adopter vis-à-vis du Nouveau Front Populaire. L’ancien Premier ministre nous adresse la mise au point suivante, que nous publions volontiers.
Dans son éditorial du Journal de ce jour, Laurent Joffrin sous-entend que je me serais éloigné de la gauche en souhaitant que les suffrages des électeurs se portent sur les candidats les plus républicains, dès le premier tour de l’élection prochaine, et pas sur ceux du RN ou de LFI. Il en déduit par ailleurs que de ce fait, je placerais le RN et le Nouveau Front populaire sur le même plan.
Ces propos appellent de ma part la mise au point suivante.
On ne trouvera aucune déclaration de ma part plaçant les candidats du NFP et du RN sur le même plan. Je mets au défi quiconque d’en trouver une, car telle n’est pas ma pensée. J’ai même appelé clairement, dans toutes mes interviews, à voter pour tous les candidats de gauche, dès le premier tour de scrutin, à l’exception de ceux de LFI. Je fais même campagne pour certains d’entre eux dans de nombreux départements.
En revanche, j’ai condamné comme beaucoup d’autres avant moi, qui semblent l’avoir oublié, les comportements et déclarations de certains responsables et élus de LFI, qui ont heurté mes convictions, sur la question de l’ordre républicain, de l’antisémitisme ou de l’invasion de l’Ukraine : oui, je condamne les propos qui considèrent le Hamas comme une organisation de résistance, alors qu’elle est une organisation terroriste ; oui, je condamne les propos de Jean-Luc Mélenchon lorsqu’il laisse à penser que l’antisémitisme en France serait un problème résiduel en France et ceux de ses amis qui relativisent la portée des actes antisémites survenus dans le pays ; oui, je condamne la complaisance de LFI à l’égard du régime de Poutine, exprimée constamment par ses votes au Parlement européen ou à l’Assemblée nationale au cours des derniers mois. Oui, je m’inquiète de la présence dans une alliance d’un parti qui pratique des purges dignes des grandes heures du stalinisme.
Oui, je considère que ces questions ne relèvent pas de divergences secondaires, au point que bon nombre de socio-démocrates expriment leur gêne face à la présence dans l’alliance de cette organisation. Oui, parce que je suis de gauche, résolument, je ne souhaite pas que trop de suffrages aillent vers les candidats de ce parti-là, mais qu’ils se portent sur les républicains avec lesquels nous pouvons combattre plus efficacement le RN.
Oui, parce que j’appartiens à la grande famille de la gauche humaniste, je m’inquiète que certains en soient rendus à considérer qu’on s’éloigne d’elle, lorsqu’on dénonce les dérives de l’extrême gauche, pour des raisons à la fois morales et politiques, car on ne combat clairement l’abject que si on est déterminé à le condamner, partout où il peut se trouver, avec une même volonté de le déloger.
Puisque Laurent Joffrin a évoqué la rigueur intellectuelle dans son éditorial, voilà ce qu’elle aurait pu le conduire à écrire, en s’en tenant aux faits et en s’abstenant de me prêter des intentions qui n’ont jamais été les miennes et des propos que je n’ai jamais tenus. Enfin, la gauche, c’est aussi dans mon esprit une certaine bienveillance, un refus de nuire en cédant aux effets de manche ou de tribune. Cela explique aussi cette mise au point.