Olympisme et nazisme, des affinités
Culte du corps, de la force, de la jeunesse, virilisme… Le national-socialisme se coule dans l’esprit olympique et les valeurs qu’exprime son fondateur.
Déjà, en 1916, les Jeux olympiques avaient été attribués à l’Allemagne. Mais la Première guerre mondiale avait rendu ce choix caduc. C’est le 26 avril 1931, au cours de sa 29e session à Barcelone, que le Comité international olympique (CIO) choisit Berlin pour les XIe Olympiades, qui auront lieu en 1936. La ville l’emporte contre la capitale catalane, contre Alexandrie, Budapest, Buenos Aires, Rio de Janeiro, Rome et bien d’autres. Le 30 janvier 1933, Adolf Hitler est nommé chancelier par le président Hindenburg. Le Parti national-socialiste a obtenu 33,1% des voix aux législatives. Il s’allie aux conservateurs. Adieu la république de Weimar ! Le IIIe Reich s’installe. Désormais, les Nazis n’auront de cesse d’instaurer leur pouvoir absolu et de mettre en œuvre leur idéologie raciste et expansionniste.
Que les JO puissent se tenir dans un pays soumis à un tel régime émeut fortement la communauté internationale. Mais le National-socialisme a ses admirateurs dans le monde du sport. Et parmi eux, le père de l’olympisme lui-même, le baron Pierre de Coubertin, qui ne paraît pas vraiment manifester de l’aversion à l’égard du régime nazi. Il est vrai qu’il existe tout un discours autour du sport qui va bien au-delà du « mens sana in corpore sano », du sage équilibre de l’esprit sain dans un corps sain. Les Nazis ne peuvent qu’approuver Coubertin lorsqu’il déclare : « En ciselant son corps par l’exercice, comme le fait un sculpteur d’une statue, l’athlète antique honorait les dieux. En faisant de même, l’athlète moderne exalte sa patrie, sa race, son drapeau. » Toutes les dictatures ne peuvent qu’adhérer à cette conception du dépassement de soi : une exaltation du corps comme expression d’une idéologie nationaliste et, en l’occurrence, raciste.
« Pour les Nazis, le sport est une façon de faire de la politique par d’autres moyens »
À l’époque, le choix de l’Allemagne ne s’explique pas seulement par ces sourdes connivences idéologiques. Les responsables sportifs allemands attendent depuis longtemps une telle aubaine. Theodore Lewald, président du comité d’organisation des jeux, et Carl Diem, son secrétaire général, convainquent Hitler de l’intérêt d’un événement au retentissement mondial pour l’Allemagne. Après tout, pour les Nazis, le sport est une façon de faire de la politique par d’autres moyens. Joseph Goebbels écrit : « Nous allons nous mesurer aux nations de la terre et leur montrer quelles forces l’idée de la communauté nationale est à elle-seule capable de mettre en œuvre. »
Les militants nazis ne sont, eux, pas très enthousiastes considérant que le sport allemand doit être réservé aux aryens. Ils sont peu soucieux de se mesurer à des juifs ou à des « nègres ». La décision du Führer emporte tout. La classe politique et les milieux économiques ont vite vu l’intérêt d’accueillir cet événement planétaire. « Il s’agit d’une manifestation unique, éminemment favorable à la vie culturelle et économique allemande », déclare la Chambre de commerce de Berlin. La fête peut commencer.