Otages : les affiches déchirées
Six mois après l’attaque terroriste du Hamas du 7 octobre, des mains veulent effacer le sort des otages des murs de Paris…
Jusque-là je n’y avais pas prêté attention. Mais une balade ce matin dans les rues de Paris fut pour moi un grand moment de tristesse. Partout des affiches rageusement déchirées et sur elles les noms et les photos lacérées de tous les otages encore retenus par le Hamas à Gaza.
Le 7 octobre le monde entier a vu le drame en Israël. Que des fanatiques aient massacré de sang-froid des centaines de villageois et de jeunes gens simplement réunis pour faire la fête dépassait en horreur les tragédies d’une époque qui pourtant n’en manque pas.
Tout le monde alors le sentait : rien, aucune rancœur, aucune conviction politique ne pouvait justifier une telle inhumanité. Et pourtant six mois après la sidération l’événement semble passer au second plan. Ses quelques traces, ses affiches, sont rageusement arrachées par des mains anonymes.
D’où qu’elles viennent ces mains co-signent la tuerie et dégradent la cause qu’elles croient servir. Et le geste obscène annonce la suite. Déjà les mêmes jettent le doute sur la réalité des atrocités commises sur les femmes à Beerri. Demain ils revisiteront l’évènement pour écrire l’histoire à leur manière. Effacer les traces, ainsi commence le négationnisme. Il faut avoir perdu tout repère pour confondre « résistance » et massacre des innocents.
Que la politique des extrémistes israéliens soit condamnable c’est pour moi une absolue évidence. Qu’il faille tout faire pour que les armes se taisent à Gaza, c’est une absolue urgence. Que ceux qui entravent l’aide humanitaire dans l’enclave soient considérés comme criminels c’est une absolue exigence.
Mais ce n’est pas tout. Derrière le conflit du Moyen Orient c’est l’antisémitisme qui, souvent, resurgit, la bête immonde avance à peine masquée… derrière l’antisionisme. Le signal est gravissime, bien au-delà de la communauté juive. Lorsque celle-ci redevient bouc émissaire c’est le signe que le monde entier est très malade. Les enfants d’Israël sont comme les oiseaux autrefois en cage au fond de la mine : leur asphyxie annonçait le grisou, leur mort annonçait l’explosion.
Qui a oublié la veulerie criminelle des élites allemandes au moment des premières purges nazies ? Et l’homélie du pasteur Niemoller : « Quand ils sont venus chercher les communistes je n’ai rien dit, je ne suis pas communiste. Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates je n’ai rien dit, je ne suis pas social-démocrate. Quand ils sont venus chercher les syndicalistes je n’ai rien dit, je ne suis pas syndicaliste. Et quand ils sont venus me chercher …. il n’y avait plus personne pour protester ».
Repensez-y, vous qui passez, au soleil, dans une rue de Paris, devant ces affiches déchirées, devant ces noms et ces visages d’hommes, de femmes, d’enfants disparus. L’indifférence c’est la paralysie de l’âme, disait Tchekoff. L’indifférence tue. N’ayez aucune illusion : si vous fermez les yeux la barbarie viendra vous chercher un jour, vous aussi. Où que vous soyez.
