Parcoursup : l’algorithme des inégalités

publié le 16/05/2023

Tout n’est pas mauvais dans le mécanisme de répartition des futurs étudiants. Mais il confirme les injustices de départ plus qu’il ne les corrige

FRANCE - Perpignan, 2 fevrier 2023, forum des etudes superieures et des metiers, à l heure de parcoursup - Photo Jc Milhet / Hans Lucas /

La tension monte… Les vœux sont saisis dans Parcoursup depuis le 6 avril. Les futurs étudiants attendent maintenant les résultats d’admission des établissements supérieurs, dont la première salve arrivera le 1er juin.

Une tension inégalement répartie. Tous sont égaux devant Parcoursup, mais certains plus que d’autres… Même muni des meilleures intentions avec la création de Parcoursup, le Ministère n’a pas réduit les inégalités scolaires pour l’accès au supérieur.

Par certains aspects, Parcoursup favorise l’égalité des chances, grâce à l’exhaustivité des formations du supérieur et aux informations présentes sur Parcoursup, ce qui permet à tout un chacun de les découvrir et de candidater, et à la centralisation du dossier de chaque élève sur une seule plateforme.

Malgré des améliorations, de nombreux points noirs, en particulier pour les enfants des milieux défavorisés

En outre, les mécanismes de priorisation des boursiers, des bacheliers technologiques pour les BUT et des bacheliers professionnels pour les BTS favorisent leur accès au supérieur par le jeu de discriminations positives.

Cependant, malgré ces améliorations, de nombreux points noirs assombrissent le tableau, en particulier pour les enfants des milieux défavorisés.

Le fait que tous les lycéens aient accès à l’ensemble des formations possibles est un leurre

D’abord un effet pervers. Parcoursup a intégré dans son mécanisme des critères géographiques (pour éviter de payer des frais de logement), qui pourraient en théorie améliorer l’égalité des chances, renforce en fait l’assignation à résidence dans des territoires défavorisés, où l’offre en établissements supérieurs est plus faible en nombre et en qualité.

De même, le fait que tous les lycéens aient accès à l’ensemble des formations possibles est un leurre. En effet, tous les élèves n’ont pas la même capacité à chercher et à analyser l’information. Il y a une énorme différence entre les lycéens défavorisés qui trouvent très peu de formations sur Parcoursup car ils réalisent leurs recherches avec peu de mots, tandis que les lycéens au bagage socio-culturel plus élevé en trouvent beaucoup plus.

Dans les milieux favorisés, les enfants sont le plus souvent aidés par leurs parents pour la rédaction des projets motivés

Outre ces leurres, la procédure Parcoursup est compliquée et la manipulation de l’outil pas toujours aisée, surtout pour les élèves éloignés du numérique et qui ne sont pas accompagnés par leurs parents.
Concernant la rédaction des projets de formation motivés, tous les témoignages convergent pour dire qu’il est nécessaire que les parents d’élèves s’impliquent.

Dans les milieux favorisés, les enfants sont le plus souvent aidés par leurs parents pour la rédaction des projets motivés (lettres de motivation pour les formations supérieures indiquées dans les vœux), alors que c’est moins le cas voire pas du tout le cas dans les milieux défavorisés, à cause d’un bagage socio-culturel plus faible ou de la barrière de la langue. À noter que cela n’était pas demandé dans d’APB, l’ancêtre de Parcoursup.

Telle est la nature de Parcoursup : une neutralité… formelle

Enfin, la zone « Activités et centres d’intérêt » a été imaginée pour que les élèves puissent mettre en avant leurs atouts hors cadre scolaire, sauf que les activités extrascolaires sont bien souvent l’apanage des enfants des catégories sociales les plus favorisées, donc cela peut pénaliser certains enfants des catégories défavorisées, qui ne pourront rien remplir.

Telle est la nature de Parcoursup : une neutralité formelle, mais un outil qui reproduit les inégalités de départ et ne les corrige pas.