Parents en colère, profs… au tableau !

par Valérie Lecasble |  publié le 22/05/2023

Trop, c’est trop! Désespérés de ne pas être entendus, les parents partent à la bataille juridique. En espérant moins des réparations que ce qui leur manque cruellement: des profs! 

Toulouse, France, -Photo Patrick Batard / Hans Lucas. Toulouse, France,

Deux fois ! C’est la deuxième fois que des parents en colère, réunis au sein d’un collectif intitulé #Onveutdesprofs lance une action en justice contre l’État. En cause, bien sûr, les absences à répétition des enseignants et le lot de cours perdus pour les enfants. Pauvres gamins ! Autrefois, leur grand jeu était de dégoter le meilleur moyen pour sécher la classe sans être punis. Aujourd’hui, ils désespèrent de trouver des profs pour assister aux cours.

Ne sachant plus à quel saint se vouer et fatigués des discours d’impuissance de l’école, les parents ont choisi la voie juridique. Aujourd’hui, si les bancs de l’école restent vides, ce n’est pas que les enfants ont pris la poudre d’escampette, mais que les profs ont préféré rester à la maison. Après tout, l’école est obligatoire, non ? Pour les élèves, donc pour les profs.

Le collectif #Onveutdesprofs réclame à l’État cinquante euros par jour de cours perdu en maternelle ou à l’école primaire et dix euros par heure au collège et au lycée. Sans oublier cinq cents euros de préjudice moral et le remboursement de frais si jamais il a fallu recourir à des cours particuliers.

L’an dernier, 15 millions d’heures de cours ont été perdues, selon les propres dires de Pap Ndiaye, ministre de l’Éducation nationale. C’est dire l’ampleur de la crise.

De confinement, en protocole sanitaire, le Covid est passé par là. Et devant la complexité des réglementations et la difficulté à les appliquer, nombre de professeurs ont baissé les bras. Le malheur est que depuis, ils ne sont pas tous revenus. Maladies diverses, fatigue, formation professionnelle, conseils de ceci ou de cela… tout est bon. Dans les écoles, les collèges et les lycées, certaines classes restent sans professeurs de français ou de mathématiques pendant plusieurs mois.


Trop, c’est trop. L’an dernier, les parents ont déposé 127 demandes d’indemnisation auprès de 17 tribunaux administratifs français pour manquement au service public. En 2023, ils ont constitué une cinquantaine de nouveaux dossiers qui alimentent à présent leur deuxième action en justice. Si les plaignants obtenaient gain de cause, la note s’élèverait à 200 000 euros.

À l’évidence, le but des parents, furieux et désarmés, ne serait pas de récupérer de l’argent, mais bien de faire pression sur l’Éducation nationale afin qu’elle trouve enfin des solutions. Eux-mêmes seraient prêts à soumettre leurs propres propositions concoctées avec d’autres parents.
En ordre de bataille sous la bannière #OnVeutDesProfs, leur meilleure arme est le référé d’urgence afin de contraindre l’État. Parfois, cela fonctionne comme dans ce lycée d’Indre-et-Loire, heureux de se voir affecter un remplaçant au prof de français absent depuis… cinq mois.

Afin d’attirer les professeurs qui désertent le métier, Emmanuel Macron leur a proposé il y a peu un « pacte », dont il a fait une priorité en promettant de gagner jusqu’à 500 euros nets supplémentaires par mois s’ils acceptent de remplacer les professeurs absents et assurent les gardes à l’étude.

Reste à régler les problèmes de fond : conditions de travail, crise d’autorité, niveaux des salaires, mixité scolaire… Vaste chantier.

À la prochaine rentrée en septembre, 1500 classes vont être fermées en France. La faute à moins d’élèves ? Pas seulement.

Valérie Lecasble

Editorialiste politique