PCI : le cercle des partis disparus

par Marcelle Padovani |  publié le 24/02/2024

Dans les années 90, le PCI, organisation inventive, ouverte et à l’avant-garde de la démocratie en Europe, a sombré… Pourquoi ?

D.R

Le Parti communiste italien a-t-il été un modèle ? Certainement. À une époque où les débats droite-gauche étaient plus nets qu’aujourd’hui, le PCI paraissait en avance sur ses homologues des autres pays de l’ouest européen, plus démocrate , moins stalinien. Mais c’était une autre époque , lorsque le « laboratoire « d’au-delà des Alpes » mettait du pain sur la planche des démocraties européennes. C’était surtout le plus puissant en Europe, façonnant la vie politique italienne avec, à droite, la Démocratie-chrétienne. Un modèle à gauche qui semblait faire pendant aux sociales-démocraties du nord de l’Europe.

Efficace gestionnaire de la vie publique dans l’Italie centrale, il avait réussi à être à la fois une organisation de lutte et de gouvernement, un parti réformiste, tout en restant toujours très combatif. Jusqu’à atteindre 2 millions d’adhérents et l’approbation de plus du tiers de l’électorat de la péninsule : 34 % des suffrages aux élections européennes de 1984. Ce fut son apogée. Dès 1991, deux ans après la chute du mur de Berlin, il disparaît de l’horizon .Comme à l’improviste, subrepticement. Une pâle réplique surgit, le Parti démocratique de la gauche (PDS) , qui se traine aujourd’hui à 20 % des suffrages. Une formation éclectique et brouillonne, à des années-lumière de toute nostalgie marxiste et de grand chambardement.

À la veille des élections européennes, un livre essaie de comprendre. Comment ce parti, qui portait une partie des espoirs de la gauche européenne, ce parti original, a-t-il pu s’enliser dans la tambouille politique italienne.   « L’héritage perdu du Parti communiste italien » est l’oeuvre du journaliste belge Hugues Le Paige, longtemps correspondant en Italie, et qui publiait il y a 20 ans « Il était une fois le PCI ». Certains moments historiques l’interrogent.  Dès 1976, le PCI proclame qu’une « expérience socialiste européenne est plus réalisable au sein de l’OTAN que dans les rangs du Pacte de Varsovie ». Une énormité pour ses camarades français.

Ce sont encore les communistes italiens qui proposent qu’un « compromis historique » soit signé « entre les forces qui représentent la grande majorité du peuple italien », c’est-à-dire la Démocratie chrétienne et eux. Un pacte qui constitua une très forte réponse démocratique aux terroristes d’extrême-droite comme d’extrême-gauche. Le PCI va même jusqu’à défendre la perspective de se dissoudre dans un concept nouveau l’ « eurocommunisme ».

Tout cela pour, hélas, éclater en 1991, au cours du 18ème congrès, entre trois factions qui vont se livrer un combat à mort : une droite favorable à l’abandon de toute référence marxiste, une gauche qui veut s’y accrocher à tout prix, et un centre qui ne pense qu’à gouverner pour gouverner. Personne ne réussira une réunification qui aurait inventé un vrai programme de rupture, réalisable dans une démocratie.

D’où l’ultime interrogation de l’auteur : le communisme a-t-il encore une utilité ?

L’héritage perdu du Parti Communiste Italien, une histoire du communisme démocratique, Hugues Le Paige, les impressions nouvelles, 280 pages

Marcelle Padovani

Correspondante à Rome