Pierre Brochand, l’escroc intellectuel du Fig-Mag (1) « Tout immigré est suspect »
Document. LeJournal.info publie toute cette semaine une analyse précise et une réfutation rigoureuse, en cinq volets, par Laurent Joffrin, des thèses exposées après les émeutes, par l’ancien patron de la DGSE, présenté comme le phare intellectuel de l’extrême-droite. Premier volet
L’entretien a fait grand bruit dans les cercles conservateurs. Ancien diplomate, ancien patron de la DGSE, Pierre Brochand donne à chaud un diagnostic péremptoire sur les émeutes consécutives à la mort du jeune Nahel M.
Plutôt que le silence ou l’indignation morale, nous avons choisi d’examiner sérieusement ce discours, présenté par les commentateurs réactionnaires comme le modèle du genre. C’est ainsi que LeJournal.info publie une réfutation précise, systématique, des propos de ce Pierre Brochand, intronisé penseur en chef de la doxa conservatrice.
Nous avons ainsi reproduit son long texte dans sa quasi-totalité (en italique), en insérant à chaque fois (en texte normal) les réponses que nous lui faisons.
Voici d’abord le titre choisi par le Fig-Mag, l’introduction d’Eugénie Bastié, puis l’entretien lui-même, avec les réponses intercalées au fur et à mesure. Le texte d’origine est très long. Nous avons donc préféré le publier en cinq parties pendant toute une semaine.
1/ Tout immigré est suspect
Titre du Figaro-Magazine :
Pierre Brochand (ex-DGSE) : « Si nous en sommes là, c’est à cause d’une immigration de peuplement massive »
Par Eugénie Bastié
« Après les émeutes, « le pronostic vital du pays est engagé », affirme l’ancien directeur général de la DGSE au Figaro Magazine.
Introduction du Fig-Mag :
Pierre Brochand a été directeur général de la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) de 2002 à 2008, ainsi qu’ambassadeur de France, notamment en Hongrie et en Israël. Sa parole est extrêmement rare dans les médias. En exclusivité pour Le Figaro Magazine, il livre son regard sur les émeutes, un moment charnière de notre histoire.
Selon lui, nous vivons la révolte contre l’État national français d’une partie significative de la jeunesse d’origine extra-européenne présente sur son territoire. Cette explosion est le résultat de décennies d’aveuglement et de propagande envers une immigration de peuplement dont on n’a jamais mesuré les conséquences. Il analyse le cocktail fatal que devait constituer la rencontre entre une société des individus fondée sur l’ouverture et la démocratie et l’arrivée de diasporas entières au bagage culturel totalement différent. Est-il trop tard ?
Auteur d’une intervention remarquée à l’Amicale gaulliste du Sénat, l’ancien directeur de la DGSE – qui est intervenu lors d’un colloque de la Fondation Res Publica sur le thème : « Pour une véritable politique de l’immigration » – invite à ne pas commettre les mêmes erreurs que par le passé et livre ses pistes pour sortir de cette crise inédite dans l’histoire de la France. »
Réponse LeJournal.info
Voilà une introduction qui ne brille pas par sa distance critique, mais enfin, c’est le Fig-Mag…
Ce Brochand est présenté comme un expert indépendant, fort de sa longue expérience, dont le lecteur déduit qu’elle l’a conduit aux conclusions qu’il livre sur un ton supérieur. Problème : le Fig-Mag se garde bien de préciser que Brochand conseille Éric Zemmour. Autrement dit, cet ancien diplomate qui se pose en expert de l’immigration placé au-dessus de la mêlée, est aussi un proche de d’extrême-droite, même s’il ne figure dans aucun organigramme.
Ce qui n’empêche pas d’examiner ses thèses, point par point.
LE FIGARO MAGAZINE. – « Dans votre intervention au Sénat en novembre 2022, vous évoquiez plusieurs scénarios provoqués par l’immigration incontrôlée qui sévit dans notre pays depuis des années : interdiction, absorption, négociation, séparation, affrontement. Les émeutes qui se sont produites pendant cinq jours montrent-elles selon vous que c’est le scénario de l’affrontement qui domine ?
Pierre BROCHAND. – Au vu de ce qui s’est passé ces jours derniers, j’aurais du mal à vous contredire. Je voudrais aussi indiquer d’entrée de jeu que je n’ai pas l’habitude de commenter l’actualité à chaud, source d’erreurs ou d’à-peu-près. Mais quand les circonstances imposent à l’esprit un événement charnière de cette envergure, il est difficile de résister à la tentation. »
Brochand ne commente pas l’actualité à chaud (il est très au-dessus de ces trivialités) mais il se fait violence. Héroïque sacrifice. Seule réserve : cet exercice, dit-il, est « source d’erreur et d’à-peu-près ». Effectivement…
P.B – « Pour en revenir à « l’affrontement », il survient inéluctablement lorsque tout le reste est abandonné, inopérant, dépassé. Car, vous l’avez rappelé, quand un groupe humain cherche à s’installer chez un autre, il n’y a que cinq possibilités. Reprenons-les brièvement, afin de remonter la chaîne des causes qui conduit à nos malheurs d’aujourd’hui. »
Phrase typique du personnage, pétri de certitudes : l’affirmation tient lieu de démonstration. Ainsi de l’expression « quand un groupe humain cherche à s’installer chez un autre ». Elle donne le sentiment que les immigrés forment un bloc homogène, conscient de lui-même et animé d’une volonté préalable et collective de « s’installer chez les autres », tels les Goths ou les Wisigoths pénétrant en troupes hostiles dans l’empire romain. Vision paranoïaque propre à plaire aux lecteurs du Fig-Mag mais qui ne correspond à aucune réalité historique.
P.B « L’interdiction », à savoir la fermeture des frontières au nom du principe de précaution (la voie polonaise), n’a jamais été sérieusement envisagée chez nous, les frères jumeaux de l’humanisme et de l’économisme se donnant la main pour y veiller. »
Cette « interdiction » a été écartée historiquement parce que les gouvernements des Trente Glorieuse (De Gaulle compris…) ont jugé nécessaire de recourir à l’immigration pour aider le pays à se reconstruire et à développer son industrie. C’est que Brochand appelle « l’économisme ». Quant à « l’humanisme », qu’il déplore manifestement, c’est le simple respect par la France des conventions internationales qu’elle a signées.
P.B « De même, l’« assimilation » a été rapidement abandonnée, sans tambour ni trompette, par renoncement à nous-mêmes, mais aussi nécessité, face à des flux trop massifs pour qu’elle puisse fonctionner. D’où l’enthousiasme pour « l’intégration », sorte de compromis miracle, d’inspiration anglo-saxonne, où chacun fait un pas vers l’autre, tout en gardant son quant-à-soi. Force est de reconnaître que cette démarche n’a que médiocrement réussi en France. »
C’est l’antienne de l’extrême-droite. On a abandonné l’assimilation pour l’intégration, c’est la source de nos difficultés. L’assimilation est acceptable, l’intégration ne produit que des « Français de papier », qui sont des éléments en fait allogènes, qui constituent une menace pour le pays. Tel est le sens de la distinction.
Comment définit-on les deux concepts ? Dans le premier cas, l’immigré perd tout caractère propre, toute attache avec le pays d’origine. Dans le second, tout en s’intégrant à la société, il garde une personnalité originale, des traits culturels particuliers, ce qui en fait, pour les nationalistes, un faux citoyen français.
En fait, la plupart des immigrés se situent entre ces deux pôles, ce qui rend la distinction difficile à appliquer. Un Français musulman qui respecte les lois et vit en bon voisinage, tout en pratiquant sa religion et en gardant des habitudes particulières dans sa vie privée (alimentaires, familiales, vestimentaires…), ne gêne personne et trouve naturellement sa place dans la République. Pour l’extrême-droite, c’est néanmoins un personnage louche, un « Français de papier ».
P.B – « D’une part, et à l’inverse de l’assimilation, le contrat minimal qui la sous-tend – « respect des lois » contre « emploi » – fait peser l’essentiel de l’effort sur le pays d’accueil, en matière de débours financiers comme d’entorses à ses principes (mérite et laïcité). D’autre part, l’accès au travail ne peut être que limité, pour des immigrants à très faible qualification et qui, parfois, s’autoexcluent du marché pour des raisons qui leur sont propres. De sorte que les « intégrés », certes plus nombreux que les « assimilés », ne sont pas pour autant majoritaires. » « La « séparation » n’est que le résultat de ce bilan insatisfaisant. Ce qui n’est guère surprenant.
Sans aucune preuve, sans aucun chiffre, sans citer la moindre étude, Brochand postule que la majorité des immigrés et de leurs enfants ne sont pas intégrés à la France et encore moins assimilés. Qu’en sait-il ? Il se fonde sur le comportement d’une frange de la jeunesse des cités, qui rejette effectivement avec violence les symboles de l’État français et pratique l’incendie et le pillage, ce pour quoi ces délinquants doivent être condamnés.
Mais les autres, tous ceux qui ont un emploi, un commerce, qui paient leurs impôts, respectent les lois, s’occupent de leurs enfants, vivent paisiblement et dont on ne parle pas ?
Brochand s’abstient d’en dire un mot, mettant tous les immigrés dans le même sac d’un ton sans réplique, coupables d’être des « intégrés », c’est-à-dire des faux Français, et non des « assimilés ».