Pinocchio Bardella
Le RN affirme qu’il a accepté le principe de l’Union européenne. À chaque fois qu’il le dit, son nez s’allonge un peu plus.
Quitte à se répéter, il faut y revenir inlassablement. Tout comme les protestations d’innocence de Donald Trump, le discours du Rassemblement national sur l’Europe repose sur ce qu’on appelait dans les anciens pays communistes « le mensonge déconcertant ». C’est-à-dire un mensonge si énorme qu’il laisse ses auditeurs sans voix, abasourdis, incapables de réfuter des affirmations totalement contraires à la simple vérité factuelle, mais assénées d’un ton si péremptoire qu’il en devient intimidant.
Le Rassemblement national, officiellement, a accepté l’Union européenne. Il ne veut plus en sortir et se contente de plaider pour sa réorientation dans un sens moins fédéral, plus soucieux de la souveraineté des nations. Tel est, en tout cas, le discours servi aux médias, qui font grand cas de la conversion du RN à un certain réalisme. Mais si l’on écoute bien les discours, les déclarations, les slogans, c’est une tout autre chanson.
Première remarque : Marine Le Pen s’est ralliée à l’Union, mais l’avez-vous entendu, une seule fois, en dire du bien, même sur un aspect mineur, partiel, secondaire de sa politique ? Jamais. Ses discours sur l’Europe sont des réquisitoires implacables, où tout ce qui vient de Bruxelles est mauvais, néfaste, scandaleux ou vicieux.
Mensonge éhonté
Ainsi des institutions, dominées, selon elle, par une Commission européenne qui s’arroge des pouvoirs illégitimes, exerce un pouvoir bureaucratique et désincarné, qui réduit l’autonomie des nations à la plus simple expression. Mensonge éhonté, quand on sait que c’est le Conseil européen – composé des chefs d’État ou de gouvernement, et donc émanation des nations – qui prend les décisions principales dans l’Union et dispose d’un droit de veto sur toute orientation qui lui déplaît.
Pour sortir de cette dictature, le RN propose des réformes. Mais si on les considère cinq minutes, elles consistent, par leur esprit et leur lettre, à défaire systématiquement l’édifice bâti avec peine par plusieurs générations de leaders européens, dont Adenauer, De Gaulle, Schmidt, Giscard, Mitterrand ou Sarkozy, tous acharnés, on s’en souvient, à abaisser leur propre pays. Rétablissement des frontières nationales, préférence nationale et non européenne pour les commandes publiques, destruction de la politique agricole commune, dissolution du marché européen de l’énergie, refus de toute législation commune qui serait supérieure au droit national, abolition du « Green deal » communautaire, refus de toute défense commune. Le reste à l’avenant.
Telle est la grande farce de cette campagne : le premier parti de France se dit ouvert, prêt aux concessions, pragmatique dans son opposition à une Europe supranationale. Alors qu’en fait, il n’a rien appris, ni rien oublié de son ancienne volonté de sortir de l’Union. En fait, il veut bien y rester, à condition qu’elle disparaisse. Ainsi ceux qui voteront pour lui doivent le savoir : il propose à la France de suivre l’exemple de la Grande-Bretagne sous une forme hypocrite. Est-ce vraiment ce que veulent les Français ?